OPINION

Guerre moderne: le combat médiatique
إعداد: Lieutenant-colonel (FR) Pierre-Henri Aubry
Coopérant militaire - Beyrouth

La guerre moderne se déroule, aujourd’hui comme avant, sur le terrain et exige, aujourd’hui comme avant, de la part du soldat, discipline, courage et compétence. De même, la guerre moderne se déroule, aujourd’hui comme avant, aussi dans les états-majors et impose aux officiers, savoir-faire, compétence et sang-froid. Mais, aujourd’hui, la guerre moderne touche de plus en plus les populations civiles, qu’elles soient visées directement ou déplacées, impliquées de près ou de loin: désormais nul n’échappe à la guerre.

 

Le développement fulgurant des technologies de l’information et de la communication amplifie ce phénomène, qui plonge, virtuellement, chacun, à travers la télévision ou l’internet, au cœur des opérations: ainsi, les médias possèdent aujourd’hui un pouvoir incomparable. Et les protagonistes des conflits contemporains sont tentés d’utiliser ces nouvelles technologies à leur profit, pour justifier leur politique et leurs actions, pour recueillir des soutiens ou pour porter atteinte et affaiblir l’adversaire. La propagande, qui a toujours existé en temps de conflit, est, aujourd’hui comme avant, utilisée par les parties adverses. Mais, aujourd’hui, grâce à ces nouvelles technologies, la guerre de l’information et de la communication, est permanente et touche directement un «public de masse».

 

En janvier 2013, une affaire médiatique a ciblé l’armée française engagée au Mali. Alors que l’opération se déroulait strictement dans le cadre du droit international et qu’aucun manquement au droit des conflits armés n’avait été constaté, une seule photographie publiée par un journal sur internet, a fragilisé la légitimité de l’engagement militaire de la France et porté atteinte à l’image de son armée.


Cette photographie d’un soldat portant un foulard orné d’une tête de mort, posant devant son véhicule blindé, a fait le tour des réseaux sociaux, alimentant les critiques contre l’armée française, contre les valeurs portées par ses soldats, voire contre l’engagement de la France au Mali.

 

Cet exemple, montre combien il est facile et efficace, d’utiliser le choc émotionnel de l’image, facilement et rapidement diffusée au public de masse grâce aux nouvelles technologies de la communication et de l’information, pour créer et contrôler, à son profit, un courant d’opinion à grande échelle, voire global. Vrai pour l’image, cet exemple vaut aussi pour les mots, les idées et les analyses, qu’une multitude d’experts, à travers une multitude de médias, peuvent diffuser au sujet de ou contre l’action d’un Etat, y compris de son action militaire. Aujourd’hui, face au pouvoir d’investigation des médias et au pouvoir de diffusion de masse des nouvelles technologies de la communication et de l’information, il est vital de contrôler son image et de maîtriser son information. Une véritable «communication opérationnelle» est donc nécessaire afin de faire connaître au grand public la légitimité, les objectifs et la réalité des opérations. C’est un combat médiatique, qui exige préparation, rigueur et professionnalisme à tous les échelons de la hiérarchie militaire.