L’impact De La Chute Du Prix Du Pétrole Sur Les Pays Du Moyen-Orient: Crise Durable Ou Conjoncturelle?

L’impact De La Chute Du Prix Du Pétrole Sur Les Pays Du Moyen-Orient: Crise Durable Ou Conjoncturelle?
Préparé par: Prof.Georges Labaki
Professeur à NDU

Introduction

Le prix du pétrole a enregistré une chute vertigineuse depuis près de deux ans. Il est passé de 100 dollars à près de 20 dollars pour évoluer entre une fourchette de 40 à cinquante dollars le baril. Cette chute spectaculaire des prix préfigure-t-elle une tendance durable ou est-elle conjoncturelle ? Les prix ont-ils une chance de revenir à leur niveau précédent ? Quel en sera l’impact sur les pays du Moyen-Orient dont les économies et les politiques sociales reposent sur la manne pétrolière ? Le marché de l’énergie connait une évolution et un changement géopolitique profond: de nouvelles découvertes de pétrole sont annoncées régulièrement, l’arrivée du pétrole du schiste bitumineux qui a renversé les tendances du marché et la montée inexorable des énergies renouvelables rendues nécessaires en raison du réchauffement climatique annoncent le début de la fin de l’ère du pétrole au cours des deux prochaines décennies. Cela ne manquera pas d’avoir un impact social et politique sur les pays du Moyen-Orient si des mesures économiques correctives ne sont pas adoptées.

 

La production mondiale du pétrole: une offre qui dépasse la demande

La production de pétrole a connu une grande évolution géopolitique avec l’arrivée de nouveaux pays sur le marché. Pour la première fois depuis 1975, les Etats-Unis ont dépassé l’Arabie Saoudite comme premier producteur de pétrole grâce au pétrole de schiste. La Russie talonne de près la production de l’Arabie saoudite et l’a dépassé pendant un certain temps. De nouveaux producteurs sont arrivés sur le marché comme le Brésil, les pays d’Amérique du sud et certains pays africains et les nouvelles découvertes de nouveaux puits de pétrole sont continues, Les profits énormes des compagnies pétroliers du temps ou le baril avaient atteint le niveau de 100 dollars les avait poussées à investir dans l’exploration. Des centaines de gisements ont été découverts dans un grand nombre de pays dont en Angola, en Argentine et au Kenya. Face à ces nouvelles réalités, la part des pays de l’OPEP dans la production mondiale de pétrole est tombée à 41% de la production mondiale de pétrole alors qu’elle était de 55% en 1970[1]. Cette évolution a réduit l’influence des pays de l’OPEP sur le marché du pétrole. Si cette influence demeure importante, elle n’est plus déterminante. Cela s’applique à tous les pays membres de l’OPEP dont le plus important, l’Arabie Saoudite.

 

Les facteurs qui poussent les prix du pétrole à la baisse

Une grande partie de la baisse des prix du pétrole est liée aux récents développements au niveau de l’offre et de la demande, la première ayant augmentée alors que la seconde a baissée. La faiblesse de la demande est due au ralentissement de la croissance économique mondiale et en particulier des pays émergents. Selon l’Agence américaine d’information sur l’énergie (IEA), les prévisions de demande de pétrole pour 2015 sont inférieures de 0,5 mbj aux prévisions de la fin du deuxième trimestre de la même année, moment où les prix ont commencé à baisser[2]. Selon certaines estimations, la production mondiale de pétrole a augmenté de 2 millions de barils par jour (mbj), tandis que la croissance de la demande n’a été que de 0,7 mbj. Cette hausse de l’offre est principalement due à la production du pétrole de schistes aux Etats-Unis[3].

Un autre facteur qui explique la baisse du prix du pétrole est la politique des pays de l’OPEP et spécialement l’Arabie saoudite qui a cherché à évincer du marché les producteurs de pétrole non-conventionnel provenant du schiste et du sable bitumineux dont les coûts de production sont élevés par rapport au pétrole conventionnel afin de pousser les premiers à la banqueroute. Dans une telle stratégie, la demande augmentera de nouveau par rapport à l’offre au cas où l’extraction du pétrole de schiste s’arrêtait. En maintenant sa production au même niveau et en refusant de la baisser pour équilibrer l’offre et la demande sur le marché mondial, l’Arabie Saoudite vise à rendre l’exploitation du pétrole non-conventionnel moins rentable. La décision de l’OPEP de ne pas réduire la production alors que les prix ont commencé à baisser a provoqué un surplus de pétrole sur le marché mondial qui a entrainé une chute des prix.

 

La production du pétrole de schiste américain résistera à la baisse des prix

Il existe des réserves énormes en schistes bitumineux aux Etats-Unis, au Canada, en Russie, au Venezuela, en Europe, en Afrique et en Asie. Ces réserves peuvent assurer pour des siècles les besoins en pétrole de la planète. Ce pétrole est extrait par la technique de fracturation qui consiste à injecter de l’eau dans le sable de schiste. Le coût de production du pétrole de schiste est plus élevé par rapport au pétrole conventionnel. Les estimations du seuil de rentabilité de ce type de production varient selon les champs d’exploitation et les producteurs entre 40 et 70 dollars. Quant au pétrole conventionnel, le cout d’exploitation tourne autour de 10 dollars par baril comme pour les hydrocarbures du Moyen-Orient. Malgré la baisse du nombre des puits de pétrole de schistes aux Etats-Unis, cette production résistera à la crise pour des raisons géostratégiques et économiques. Le pétrole n’a jamais été aussi abondant à tel point qu’on ne peut plus parler de pic du pétrole[4]. De plus, la production de pétrole de schiste est potentiellement plus rapide à répondre aux évolutions des prix que les productions conventionnelles car l’exploitation des puits est plus rapide. Les producteurs de pétrole de schiste ont donc la possibilité d’ajuster leur production dans des délais relativement courts. Par conséquent, si la baisse de prix du pétrole a déjà poussé certaines compagnies à arrêter l’exploitation du pétrole de schistes - sans provoquer un impact décisif sur le marché du pétrole de schiste- une hausse des prix pourrait rapidement relancer le forage de nouveaux puits.

 

Les Risques géopolitiques

Les nouvelles découvertes pétrolières aux quatre coins du monde et l’exploitation du schiste bitumineux ont modifié la géopolitique du pétrole et poussé les prix à la baisse. Les perturbations de la production liées aux risques géopolitiques peuvent pousser les prix à la hausse mais sans atteindre des seuils élevés (100 dollars le baril). Ainsi, la récente baisse des prix du pétrole a son plus bas niveau depuis 2009 s’est retournée vers la hausse en raison de la diminution de la production du pétrole de schistes au Canada en raison des feux de forêts et des perturbations politiques en Libye, au Nigeria et dans le nord de l’Irak. Inversement, certains facteurs géopolitiques peuvent pousser les prix du pétrole à la baisse. Ainsi, la levée des sanctions sur l’Iran va permettre à ce pays d’augmenter très substantiellement sa production pour retrouver son niveau d’avant l’embargo ce qui pourrait entrainer les prix du pétrole à la baisse. De même, certains pays augmentent leur production de pétrole afin de pallier à leur manque de devises qui risquent de les déstabiliser. Dans ce cas, les prix peuvent évoluer vers la baisse.

 

Impact sur les pays du Moyen Orient

La diminution du prix du pétrole ne manquera pas d’avoir des répercussions sur les pays dont les finances publiques dépendent du pétrole comme les pays du Moyen-Orient, d’Afrique du Nord, la Russie et le Venezuela. La rente pétrolière permettait à ces pays de financer leurs infrastructures et d’acheter la paix sociale en jouant le rôle d’état providence envers leurs citoyens. La diminution de la rente pétrolière impliquera des ajustements structurels aux économies de ces pays et de nouvelles mesures de réduction de dépenses pénibles et lourdes. Plus la population de ces pays est nombreuse, plus l’impact socio-économique sera important. Des politiques d’austérité budgétaires s’installent dans ces pays et une forte réduction des subventions et des dépenses sociales.

 

L’Arabie saoudite

La chute du prix du pétrole qui sera probablement irréversible aura des conséquences économiques, sociales et géopolitiques. Or, la chute du prix du pétrole est largement en raison du refus de l'Arabie saoudite de réduire sa production provoquent un surplus sur le marché. Ce choix de l'Arabie saoudite, est lié à la volonté de ce pays de préserver ses parts de marché, quitte à voir ses recettes publiques diminuer et surtout à provoquer la faillite des compagnies qui exploitent le schiste bitumineux car plus les prix baisses plus l’exploitation des schistes bitumineux est moins rentable.

 

Les conséquences économiques

Au niveau économique, ont dénote un ralentissement de l’activité économique, une baisse de la croissance du PIB et l’adoption pour la première fois en Arabie saoudite d’une politique d’austérité budgétaire pour contrecarrer les déficits causés par la baisse de 60% du prix du baril de pétrole. La chute du prix du pétrole a fortement affectée l’Arabie saoudite qui tire 90% de ses revenus budgétaires du pétrole. Le baril de pétrole est tombé de 106 à 37 dollars en l'espace de 18 mois, et les recettes publiques en ont été fortement affectées. Même si la dette de l’Arabie Saoudite est inexistante, il existe un déficit public énorme. Cette baisse des prix pétroliers, a privé l’Arabie saoudite de rentrées financières conséquentes : les avoirs extérieurs nets ont baissé d’environ 87 milliards de dollars en 2015, et le budget 2016 voté le 28 décembre prévoit un déficit de 87 milliards de dollars soit près de 20 du PIB alors que certains analystes tablent sur un déficit de 130 milliards de dollars[5].

Dans ces conditions, les prix de l'eau, de l'électricité, et des carburants à base de pétrole — largement subventionnés dans le royaume ont été revues à la hausse. Ces subventions sont énormes. En effet, 61 milliards de dollars ont été consacrée en 2015 par l'Arabie saoudite aux subventions du secteur de l'énergie, dont la moitié pour l'essence et le diesel L'essence sans plomb a augmenté de 50% de 16 centimes de dollar le litre à 24 centimes de dollar. La diminution de la rente pétrolière en 2016 va se traduire par une diminution des dépenses publiques et des subventions[6].

 

Les conséquences sociales et politiques

 La chute des prix du pétrole peut-elle elle avoir de graves conséquences sociales pour une population qui vit sous un régime de l’état providence depuis des décennies? La dimension des aides de l’état, la diminution des dépenses publiques dans un pays ou l’état est le moteur principal de l’économie pourrait-elle avoir de graves répercussions sociales? Sans aucun doute, si ces mesures accélèrent la pression économique sur les classes pauvres et sur les classes moyennes, il pourrait y avoir un certain nombre de mécontentements surtout que les revendications du printemps arabe pour un meilleur partage des richesses risquent de trouver un écho favorable auprès de certaines couches de la population sans oublier la proximité de l’Etat islamique qui ne cesse d’attaquer le régime.

En réalité, le régime ne peut pas ignorer les revendications sociales de sa population surtout les classes moyennes et populaires. Déjà avec le début du printemps arabe, le régime saoudien a dépensé plus de cent trente milliards de dollars en aides sociales et en subventions pour ses citoyens.. Or le régime doit faire face à une situation sociale difficile. En effet, 60% des saoudiens ont moins de 30 ans et 47% moins de 25 ans. En outre, 300,000 jeunes arrivent annuellement sur le marché du travail et la pauvreté existe bel et bien dans le royaume dont la population est élevée (près de 30 millions). En effet, plus la population est élevée, plus les dépenses sociales sont importantes. La crise se fait ressentir sur une économie basée sur les investissements du secteur public qui font marcher le secteur privé et sur l’embauche dans le secteur public qui dépense une énorme masse salariale pour une population qui prèfère l’embauche dans le secteur public au secteur privé. En effet, la majorité des saoudiens préfèrent travailler dans le secteur public ou ils bénéficient des largesses du régime qui jusqu’à une époque récente doublait périodiquement les salaires des fonctionnaires et leur accordaient des bonus fort généreux. La population ne comprendrait pas une remise en question importante de l’Etat Providence même si elle est encleinte à accepter certaines restrictions comme une réduxtion relatives de certaines subventions.

En réalité, les réserves en devises de l’Arabie saoudite estimées à plus de 600 milliards de dollars lui offrent une grande marge de manœuvres. En outre, l'Arabie saoudite n’est endettée à hauteur de 2% de son PIB, ce qui est très minime par rapport aux pays occidentaux ou en développement. Toutefois, ces réserves ne semblent pas rapidement accessibles car elles sont investies sur le cours et moyen terme dans un certain nombre de fonds comme les bonds de trésor aux Etats-Unis[7]

 

L'impact géostratégique

L’impact géostratégique de la chute des prix du pétrole sur l’Arabie saoudite est peut-être le plus important. En effet, l’Arabie saoudite qui a régné sur le marché du pétrole pendant plus de 40 ans- domination dont le paroxysme fut l’embargo sur le pétrole sur les Etats-Unis en 1973- ne possède plus cet avantage stratégique de première importance qui avait poussé les Etats-Unis à soutenir le royaume wahhabite malgré vents et marrées. En effet, les changements géopolitiques du pétrole risquent d’affaiblir l’intérêt des Etats-Unis à garder des relations privilégiées avec le royaume wahhabite surtout qu’il n’existe aucune affinité culturelle ou des valeurs communes entre les deux pays notamment après les attaques du 11 septembre. Or, l’Arabie saoudite qui doit faire face à des défis stratégiques cruciaux au Moyen-Orient a besoin de son allié américain. Un éventuel relâchement des relations entre les deux pays risque de nuire à l’Arabie saoudite engagée dans une guerre au Yémen et dans le conflit syrien.

 

Le Conseil de coopération des pays du Golfe (CCG)

Les revenus pétroliers des six pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) constituent 46% de leur PIB et les trois quarts de leurs exportations. Le PIB total de ces pays (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Oman, Qatar et Koweït) a atteint 1.640 milliards de dollars en 2015, selon le Fonds monétaire international[8]. La forte dépendance des économies du CCG du secteur des hydrocarbures constitue un élément important de vulnérabilité de leurs économies[9].

Ces pays du CCG devraient faire face à des déficits budgétaires si la baisse récente des prix du pétrole persistait[10].

La baisse des recettes publiques va forcer ce pays à déployer davantage d'efforts pour réduire les subventions à l'énergie, mais cela est susceptible d'affecter les industries qui en dépendent. Or, les pays du CCG, dépensent plus de 160 milliards de dollars en subventions à l'énergie par an[11].

 La pétrochimie, les projets d'infrastructure et le secteur privé seraient les plus affectés par une baisse continue des prix du pétrole.

Les revenus des pays du CCG, qui proviennent à 90% du pétrole, ont plus que doublé en cinq ans, passant de de 317 milliards de dollars en 2008 à 756 milliards de dollars en 2012.

Ils ont légèrement diminué à 729 milliards l'an dernier selon les estimations du FMI. Selon ce dernier, ces pays ne seront pas grandement affectés à court terme, car ils peuvent avoir recours à leurs réserves budgétaires énormes estimés à 2.450 milliards de dollars[12]. Toutefois, Bahreïn et Oman seront les plus vulnérables à une baisse des prix des hydrocarbures, le Qatar et les Emirats arabes unis étant les moins vulnérables.

 

L’Irak

Malgré une crise politique aigue, les exportations pétrolières de l’Irak ont augmentée, atteignant une moyenne de 2,9 millions de barils par jour en décembre 2014. Selon les statistiques du Ministère irakien du pétrole, l’Irak a exporte 3, 28 millions de barils en janvier 2016 contre 3,21 millions de barils en décembre. Mais ces recettes pétrolières ont baissée pour atteindre 2, 62 milliards de dollars contre 2,92 milliards de dollars en décembre à cause de la chute du prix du pétrole[13]. Ces exportations ne comprennent pas les exportations de Kirkuk et du Kurdistan irakien. En vertu d’un accord entré en vigueur à partir de janvier 2015, le Kurdistan pourra exporter 250 000 barils de pétrole par jour, et la province disputée de Kirkuk, 300 000 barils par jour. Cet accord va augmenter la quantité de pétrole disponible sur le marché international. Cela survient à un moment où les dépenses publiques sont plus élevées en raison de l’effort militaire contre Daech. En outre, les dépenses courantes de l’Irak comptent pour plus de 30 % du PIB. Le climat d’insécurité a sérieusement entravé les efforts de reconstruction et d’investissement[14].

Le projet de budget 2016 a été présenté sur la base du prix du baril de pétrole à 45 dollars. Le budget d’un montant de 88,2 milliards de dollars faisait état d’un déficit de 20,1 milliards de dollars, ou près de 20 pour cent[15]. En raison d’une chute plus importante du prix du pétrole, le gouvernement a révisé le projet de budget et a cherché à geler les embauches et à éliminer les dépenses les plus flagrantes comme la découverte de 50 000 « soldats fantômes » payé sans vraiment faire partie de l’armée.

 

L’impact de la baisse des prix du pétrole

L’impact de la baisse du prix du pétrole de l’Irak est explosif si le prix du prétrole reste sous les 70 dollars. Déjà, la contestation contre la pauvreté, le délabrement du service public et la corruption donnent lieu à de grandes manifestations. Les conséquences sociales de la chute du prix du pétrole se sont déjà fait sentire. Au plan économique, l’ impact majeur sera observé au niveau du solde budgétaire et de la balance des paiements courants: la Banque Mondiale estime que le déficit budgétaire augmentera de 6 % du PIB en 2014 à près de 20 % du PIB en 2015. Le taux de croissance du PIB réel diminuera pour s’établir à environ 1,5 % en 2015. Étant donné le manque d’accès au marché des capitaux et le haut niveau d’endettement, la balance des paiements courants enregistrera un large déficit[16].

L'impact le plus probable de la baisse des prix pétroliers sur les dépenses publiques serait une réduction des dépenses d’investissements. D’ailleurs, le gouvernement a émis des obligations afin de couvrir les dépenses publiques. L’Irak a également sollicité un report du versement des réparations restantes au Koweït, qui s’élèvent à près de 5 milliards de dollars.

La baisse des recettes pétrolières en Irak provoque une crise économique grave en raison de l’augmentation des déficits publics, d’absence d’investissement pour financer la reconstruction, le nombre pléthorique de fonctionnaires dans le secteur public, la corruption, le besoin de financement de la guerre contre Daech, la crise politique et les dépenses sociales. Des manifestations ont lieu périodiquement réclamant la réparation des infrastructures comme l’électricité et la lutte contre la corruption ce qui démontre un climat social tendu provoqué par la chute des revenus du pétrole.

 

Egypte: L’impact de la chute des prix du pétrole

Une série d’initiatives de réformes économiques avait entraîné un début de reprise de la croissance en Egypte. Mais le terrorisme qui a durement frappé l’économie égyptienne entrainant la chute du nombre de touristes, Cela s’est traduit par une grande diminution des recettes qui généraient une grande partie des devises du pays entrainant la dévaluation de la monnaie égyptienne.

L’Égypte est un pays importateur de pétrole. La consommation qui augmenté de 3 % en moyenne par an au cours des 10 dernières années a dépassé la production pétrolière. La chute des prix du pétrole devrait avoir une incidence positive sur l’économie grâce à la réduction des déficits budgétaires et extérieurs et une baisse des taux d’inflation et de la pauvreté. La baisse des prix pétroliers devrait améliorer la capacité des pouvoirs publics et des entreprises à s’approvisionner en énergie aux prix du marché. De même, la faiblesse des prix du pétrole devrait donner une marge de manœuvre au gouvernement pour poursuivre son programme de réforme. Les pouvoirs publics devraient pouvoir plus facilement réduire la subvention des carburants au cours des 5 prochaines années. Ils ont d’ailleurs augmenté les prix des carburants de 78 % dans le but de supprimer complètement les subventions en 2019. Le décret sur les tarifs d’électricité, qui vise à éliminer les subventions à la fin de l’exercice 2018/2019 est toujours en vigueur. Les autorités ont déjà réalisé des économies en raison des faibles prix du pétrole, les dépenses liées aux subventions de l’énergie ayant diminué d’un quart.

La faiblesse des prix du pétrole devrait avoir un impact positif sur la réduction du déficit budgétaire. L’Égypte avait prévu de consacrer 100,4 milliards LE pour les subventions à l’énergie au titre de l’exercice 2014/2015 sur la base d’un prix de pétrole de 105 dollars le baril. Or, les prix du pétrole étant faibles, les dépenses au titre de subventions des carburants devraient diminuer. Tous ces efforts risquent d’être fortement réduits en raison de l’état d’insécurité qui empêche une véritable relance de l’économie. En outre, il existe un risque de diminution du volume des envois de fonds en provenance des pays du CCG (qui représentent près de 75 % de l’ensemble des envois de fonds), en raison de la chute des prix du pétrole malgré des engagements pris par les pays du Golfe d’aider l’Egypte. Cela pourrait affecter négativement les comptes extérieurs de l’Égypte.

 

Quels sont les risques pour les pays exportateurs du pétrole ?

L’abondance de l’offre par rapport à la demande et la stagnation de l’économie mondiale présagent le maintien d’un prix bas du pétrole. Mais il existe des raisons de penser que les prix du pétrole seront un plus élevés à moyen terme dans une marge qui oscille autour de 50 dollars le baril. Ce prix est en deçà des besoins des pays producteurs pour financer leurs politiques de paix sociales à travers les subventions et l’assistanat. En outre, à moins d’une crise politique aigue qui interromprait l’approvisionnement en pétrole, il sera très difficile que le baril remonte à cent dollar. En effet, le monde vit une période de transition énergétique. Le réchauffement climatique pousse les pays à adopter des politiques consistant à développer les énergies renouvelables dont les prix de revient baissent de jours en jours. Par conséquent, les pays émergents producteurs de pétrole doivent repenser leurs modèles économiques.

La baisse des prix du pétrole pourrait fragiliser certains pays exportateurs de pétrole surtout ceux dont le pétrole représente plus de 10% du PIB ce qui représente en moyenne 75% du total de leurs exportations. Par conséquent, la baisse du prix du pétrole constitue un frein important à la croissance du PIB. Toutefois, l’impact de la baisse des prix de pétrole est diffèrent d’un pays à l’autre.

Pour certains pays, comme le Venezuela, l’Irak le Nigeria, le Kazakhstan, le Tchad et la République du Congo la baisse des prix du pétrole semble être à l’origine de perturbations financières. A titre d’exemple, le pétrole représente plus de 90% des exportations et 40% des recettes publiques du Venezuela. La chute de leurs revenus du pétrole pourrait provoquer un défaut de paiement.

 Un autre groupe de pays comprenant les principaux producteurs de pétrole comme le Koweït, les Emirats arabes unis et l’Arabie saoudite ont d’importantes réserves financières qui les protègent pour un certain temps de la baisse des prix du pétrole.

Toutefois, plus la population d’un pays est nombreuse plus les risques économiques sont importants.

Enfin, pour d’autres pays dont le pétrole constitue un de leur revenu essentiel mais non unique comme la Russie, la chute des prix provoquera des tensions économiqueset une baisse du PIB mais sans pousser ces pays vers la faillite.

Quant aux pays importateurs de pétrole et aux consommateurs ils sont parmi les grands bénéficiaires de la chute des prix de pétrole.

 

Quelles politiques économiques pour les pays du Moyen-Orient ?

Les pays du Moyen-Orient ont commencé à appliquer de nouvelles politiques économiques consistant à :

- Réduire leurs dépenses publiques afin de réduire leurs déficits budgétaires en revoyant un certain nombre de projets d’investissements qui ont été soit gelés soit revus en baisse.

- La réduction des subventions des prix des carburants. Plusieurs gouvernements ont profité de la baisse des prix de pétrole pour réduire leurs subventions aux carburants comme les pays du Golfe et l’Egypte.

- La suppression des différentes subventions aux différents secteurs sociaux.

- Le recours à de nouvelles recettes publiques.

- L’introduction d’un nouveau système fiscal, des droits de douanes et surtout de la TVA.

- L’appel de plus en plus poussé vers le secteur privé pour prendre la relève du secteur publique.

- La privatisation de certains services publics déficitaires.

- La diversification de leurs économies et de leurs sources de revenus.

- La préparation de projets d’investissements visant à préparer la relève du pétrole.

- Accroître les recettes publiques comme à Oman qui a augmentée l’impôt sur les sociétés.

- L’augmentation des taxes comme à Bahreïn (taxes sur le tabac et l’alcool)

- La réduction des exonérations et l’amélioration de l’administration fiscale.

- La réduction des dépenses en capital comme en Algérie, en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis et en Iraq

- La réduction des dépenses courantes comme à Bahreïn, à Oman et au Qatar.

- La dépréciation monétaire comme en Algérie.

 

La plupart des pays du CCG ont augmenté les tarifs des carburants, de l’eau et de l’électricité sans exclure de nouvelles augmentations des prix. Les Émirats arabes unis et Oman ont mis en place des mécanismes de fixation automatique des prix. Pour sa part, l’Algérie a augmenté les prix des carburants, de l’électricité et du gaz naturel. Toutefois, ces prix restent très inférieurs aux prix dans la plupart des pays.

 

Pour sa part, l’Arabie saoudite a annoncé un grand plan visant à affranchir le pays de la rente pétrolière à l’horizon de 2035. La plus grande partie des dépenses sera financée par la privatisation de l’Arauco, la société d’état qui détient le monopole de la production de pétrole en Arabie saoudite, et dont la valeur est estimée à 2000 milliards de dollars. La vente de 5 pour cent des actifs de cette société rapporterait 2000 milliards de dollars qui seront consacrés à la sortie de la dépendance du pétrole. Le plan prévoit également le recours aux investissements étrangers qui seront capables d’investir dans les sociétés privatisées sur le marché national.

 

 Les limites des politiques de reformes

Malgré leur importance ces reformes démontrent une certaine limite. Ainsi, en Arabie saoudite, la réduction de certaines subventions et la politique d’austérité budgétaire ne permettront pas de réduire les déficits publics. En outre, les reformes qui se veulent fermes et rapides se heurtent à certains obstacles politiques et sociaux. Les coupes dans les dépenses sociales risquent d’être impopulaires de même que les appels aux capitaux étrangers. Elles ne pourront dépasser un certain seuil pour toucher aux réformes structurelles comme la réduction de la taille du secteur public, des dépenses sociales comme la santé et la réduction de la place de l’état en tant que moteur principal de l’économie malgré les efforts de privatisation.

Au niveau politique, l’Arabie saoudite cherche à préserver son rôle régional ce qui l’oblige à garder un taux de dépenses militaires élevé e qui entraine des dépenses supplémentaires. Or comme le budget est essentiellement financé par la renter pétrolière, les dépenses publiques resteront élevées.

Des ajustements budgétaires sans précédent seront nécessaires pour faire face à la chute des cours du pétrole. Les déficits budgétaires cumulés des pays du CCG et de l’Algérie devraient, d’après les projections, atteindre près de 900 milliards de dollars sur la période 2016–21. L’Algérie, l’Arabie saoudite, Bahreïn et Oman deviendront débiteurs au cours de ces années, leurs besoins de financement devant dépasser les réserves liquides dont ils disposent actuellement. Les projections prévoient aussi que les budgets de presque tous les pays non membres du CCG seront toujours déficitaires à la fin de la présente décennie[17].

 

De nouvelles mesures d’économie et des ajustements structurels sont nécessaires à moyen terme pour rétablir les équilibres budgétaires et reconstituer les réserves en devises. L’assainissement des comptes publics exigera des sacrifices inconnus dans l’histoire de ces pays et qui risquent d’être très impopulaires. Des mesures ambitieuses d’assainissement des finances publiques s’imposent aussi dans les pays du CCG. Elles doivent être équitables et capable de relancer la croissance. Des choix difficiles s’imposent et exigent de repenser le rôle de l’état providence. Or, il est impensable que dans le contexte politique qui prévaut au Moyen-Orient de réduire les dépenses sociales. Un autre point épineux est celui du rôle et la taille énorme du secteur public. Ainsi, les pays du CCG consacrent d’énormes ressources à la masse salariale publique et près de 50 % de plus (en part de PIB) à l’investissement public. Les efforts d’amélioration des recettes devraient principalement porter sur la conception de régimes fiscaux à large assiette. L’adoption d’une TVA de 5 % pourrait, par exemple, rapporter l’équivalent d’environ 1½ % du PIB. Les déficits sont actuellement financés en puisant dans les réserves et en émettant des titres d’emprunt. Au stade actuel, les avoirs des pays du CCG permettront de finance déficits pour le moyen terme soit les 4 ou 5 années à venir.

 

Conclusion: la nécessité de changer de modèle économique

La diminution des prix du pétrole ne manquera pas d’affecter les économies et la stabilité des pays producteurs du Moyen-Orient surtout ceux qui possèdent une population nombreuse. En cherchant à détruire les compagnies produisant du pétrole de schistes, l’Arabie saoudite s’engage dans un grand coup de poker aux conséquences hautement incertaines et risquées. Si elle a réalisé un succès partiel, le résultat est loin d’être garanti et ne le sera sans doute pas. En effet, si les prix du pétrole, l’exploitation du pétrole de schiste reprendra de plus belle. Somme toute, le monde vit une transition énergétique du pétrole vers d’autres sources d’énergies moins polluantes. Les réformes annoncées ne se cantonnent pas à un niveau purement technique à savoir la réduction des dépenses publiques et des subventions. Ils ne touchent pas à la taille du secteur public qui doit être fortement réduit ni aux structure fondamentale du système économique et social. En réalité, il s’agit d’adopte une nouvelle culture de travail et du sens de l’effort dans des sociétés habituées à l’assistanat. Il ne s’agit pas d’adopter des plans de développement faramineux mais d’avoir la volonté et la capacité de les appliquer. Il s’agira également de construire une économie durable.

 

Les réformes constitutionnelles

Sur, un autre plan, il s’agira d’introduire des réformes constitutionnelles pour garantir la bonne exécution des reformes à venir. Cela est d’autant plus important que ces pays possèdent des réserves colossales de pétrole. D’où l’obligation d’établir une bonne gouvernance dans la gestion des fonds publics. Seule la démocratie qui constitue la base du progrès est capable d’assurer la transparence et le contrôle des dépenses et de l’application des politiques de réformes.

 

Bibliographie

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• Allis Pierre, Alan K., Coaxing Oil from Shale, Oilfield Review, 2012.

• Paul Hubert, Guide pratique de la baisse des prix du pétrole, OFCE le blog, 2015.

• Autorités nationales; calculs et projections des services du Fond Monétaire International, 2016.

• Fonds Monétaire International, Perspectives économiques régionales Moyen-Orient et Afrique du Nord, 2015-2016.

• Banque Mondiale, bulletin trimestriel d’information économique de la région MENA, 2015-2016.

• Paul Hubert, Guide pratique de la baisse des prix du pétrole, OFCE le blog, 2015.

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• Marie Albert, Thomas Gillet, Les conséquences de la baisse du prix du pétrole dans les principales économies émergentes, Trésor-Eco, 2015.

• http://www.planete-energies.com/fr/medias/chiffres/production-mondiale-de-petrole

• http://www.iea.org/statistics/

• https://www.enefit.com/oil-shale

• http://prixdubaril.com/news-petrole/5341-la-baisse-du-prix-du-petrole-pourrait-ra.html

 


[1]-   Source: OPEP, www.connaissanceenergies.org, consulté le 23 mai 2016

[2]-   Source : Paul Hubert, Guide pratique de la baisse des prix du pétrole, OFCE le blog, 2015.

[3]-   Source: http://www.iea.org/statistics/consulté le 23 mai 2016

[4]-   US Energy Information Administration, Drilling productivity,eia.gov/petroleum drilling, consulté le 23 mai, 20116.

[5]-   Source : www.lesechos.fr/02158, consulté le 21 mai, 2016.

[6]-   Source: www.lemonde.fr, consulté le 15 mai 2016.

[7]-   Source: David Spiro: The Hidden Hand of American Hegemony, Petrodollars Recycling, www.cornellpress.cornell.edu/books

[8]-   Source : www.imf.org/external/french/pubs/ft/reo, consulté le 18 mai, 2016

[9]-   Ibid

[10]-  Ibid

[11]-  Ibid

[12]-  Source: Ibid.

[13]-  Source: Pétrole irakien: les exportations en hausse, www.prixdubaril.com, consulté le 21 mai 2016.

[14]-  Source: Banque Mondiale, bulletin trimestriel d’information économique de la région MENA, 2015.

[15]-  Source: www.Francediplomatie.gouv.fr, consulté le 21 mai 2016.

[16]-  Source: Banque Mondiale, bulletin trimestriel d’information économique de la région MENA, 2015.

[17]-  Source:www.leconomist.com/article, consulté le 3 mai 2016.

تأثير هبوط سعر النفط على بلدان الشرق الأوسط: أزمة دائمة أم مؤقتة؟

سجّل سعر النّفط هبوطًا جنونيًا منذ حوالى السنتين، فقد هبط سعر النفط من 100 دولار أميركي إلى عشرين دولارًا ليتأرجح ثمن برميل النفط في ما بعد بين الأربعين والخمسين دولارًا. غير أنّ السؤال الذي يطرح ههنا هو الآتي: هل يؤدي هذا الهبوط المذهل إلى وضع دائم له أم يكون رهنًا للظروف؟ هل تمتلك أسعار النّفط فرصة للعودة إلى قيمتها السّابقة؟ كيف سيؤثّر هذا الأمر على بلدان الشّرق الأوسط حيث يرتكز الاقتصاد والسياسات الاجتماعيّة على الكتلة النفطيّة؟ يشهد سوق الطاقة تطوّرًا وتغيرًا جيوسياسيًا عنيفًا: إكتشافات حقول نفط جديدة يتم الإعلان عنها بانتظام، إكتشاف إمكانية إستخراج النفط من حجر الشيست الزّفتيّ الذي قلب معادلات السّوق، والارتفاع الحتمي للطاقات المتجدّدة والذي أمسى ضروريًا في ظلّ الإحتباس الحراري. كل هذه العوامل تعلن بدء نهاية عصر النفط خلال العقدين المقبلين. وممّا لا شكّ فيه بأنّ هذا الأمر سيكون له تأثير إجتماعي وسياسي على بلدان الشّرق الأوسط إذا لم تعتمد إجراءات إصلاحيّة.

 

وفي المقابل، سيطال تأثير انخفاض أسعار النفط إقتصاد البلدان المنتجة في الشرق الأوسط واستقرارها، ولا سيّما تلك التي تشهد ازدحامًا سكانيًا. وفي محاولة منها لتدمير الشركات المنتجة للنفط المستخرج من حجر الشيست، تضع السعودية رهانًا كبيرًا من دون ضمانات للربّح. وحتّى إذا ما حققت ربحًا جزئيًا، تبقى النتيجة غير مضمونة البتّة. في الواقع، إذا ارتفعت أسعار النفط سيزدهر استثمار نفط حجر الشيست. كمحصّلة، يشهد العالم تحويلًا في الطاقة من النفط باتجاه مصادر طاقة أقلّ تلويثًا. إنّ الإصلاحات المعلنة لا تقتصر على مستوى تقنيّ بحت مع الأخذ بعين الاعتبار النفقات العامة والمساعدات الماليّة. في الواقع، يقوم الأمر على تغيير جذري لثقافة عمل ولحسّ الجهد في صلب مجتمعات معتادة على المساعدة. كما سيكون هناك ضرورة لبناء اقتصاد دائم.

وعلى صعيدٍ آخر، سيتطلّب الأمر إدخال إصلاحات دستورية لضمان حسن تنفيذ الإصلاحات المقبلة ويعدّ هذا الأمر أكثر أهمية من أن تمتلك هذه البلدان مخازن نفطية هائلة، ومن هنا ضرورة سيادة حكم جيّد في إدارة المال العام. وحدها الديمقراطية التي تشكّل ركيزة التقدم والتطور قادرة على تأمين الشفافيّة والسيطرة على النفقات وتطبيق السياسات والإصلاحات.