Le rôle perçu de la privatisation dans le renforcement du marché boursier et de l’l’investissement : le cas libanais

Le rôle perçu de la privatisation dans le renforcement du marché boursier et de l’l’investissement : le cas libanais
Préparé par: Dr. Khalil Feghali
Responsable audit - comptabilite faculte des sciences economiues et de guestion section II universite libanaise, achrafieh, beyrouth, liban

Introduction

La privatisation implique le transfert de la propriété du secteur public vers le secteur privé. Elle marque les pratiques économiques contemporaines à travers le monde.

Megginson, Nash et Van Randenborgh (1994) et Gupta et Roy (2008) ont décrit la privatisation comme ayant, parmi d’autres, les objectifs majeurs suivants :

  • la croissance de la propriété financière et l’intégration des capitaux privés dans le financement du secteur public
  • le soutien du marché boursier

Néanmoins, l’utilité théorique et pratique d’un tel phénomène, perçue par les « insiders », nous a poussés à utiliser une méthodologie visant à confirmer ou à infirmer empiriquement la théorie. Cette méthodologie, basée sur un questionnaire adressé aux dirigeants des activités publiques au Liban, a tenté d’observer les motivations de la privatisation en matière  de développement du marché boursier et de renforcement des investissements et plus particulièrement : la survie du secteur, la hausse des investissements, le recours à de nouvelles technologies, le soutien du marché boursier et la croissance de la propriété financière. La validité statistique du questionnaire selon le test de corrélation des rangs de Kendal a permis de mesurer le pouvoir du construit à évaluer, d’une part, la dépendance entre les variables, d’autre part, la prédiction du comportement des personnes interrogées. L’étude conjointe de l’aspect stratégique et de l’aspect financier de la privatisation devrait aider à mieux clarifier leurs influences respectives dans le processus.

C’est pourquoi nous avons tenté d’aborder le problème de la privatisation en évoquant dans une première partie la façon dont, au Liban, ce processus contribue au renforcement du marché boursier et de l’investissement, par l’analyse théorique du phénomène et  l’évaluation de ses conséquences.

Dans une seconde partie, nous tentons d’expliciter l’aspect empirique d’un tel processus ainsi que sa justification économique.

 

1- La privatisation au Liban contribue au renforcement du marché boursier et de l’investissement

Dans le contexte actuel, il est difficile de privatiser les activités publiques libanaises en raison de l’état de leurs investissements et de leurs coûts de production. Le financement de ces investissements nécessite un programme réalisable par l’ouverture du marché financier.

D’autre part, le développement du marché financier au moyen de la privatisation aide à la recherche de la maximisation du profit (Budima, 2006, p. 412), et au renforcement de la performance des dirigeants, en s’appuyant sur la maximisation de la richesse des actionnaires.

L’intégration économique pré privatisation

La privatisation au Liban doit être précédée par une phase d’intégration économique préparant l’incitation à la compétition, et à la mise en vente publique des actions des entreprises privatisables, permettant ainsi aux citoyens libanais de participer au développement économique du pays et de bénéficier de la compétence managériale du secteur privé.

Elle nécessite également l’ouverture des marchés afin de développer une compétition active capable de satisfaire les usagers, et une efficience dans l’allocation des ressources et de la production (Gianella et Tompson, 2007, p.24).

Selon cette logique susceptible de s’appliquer  à la totalité des entreprises publiques privatisables, la compagnie aérienne libanaise (La Middle East Airlines - entreprise publique) n’a pu sortir de son déficit chronique qu’à la suite du passage d’une gestion purement  publique à une gestion managériale guidée par la productivité et la profitabilité, particulièrement à la suite de l’application d’une déréglementation aérienne et à l’arrêt de son monopole.

En tout état de cause, la privatisation dans un marché concurrentiel aboutira sans doute à la dérégulation et à la libéralisation, même forcée, du marché. Cette dérégulation minimise les barrières juridiques à l’entrée et encourage l’investissement de nouveaux arrivants dans le secteur (Chick et Nelles, 2007, p.278) à la suite de l’abolition de monopoles largement réglementés (Caves et Christensen, 1980, p.961). L’exemple le plus frappant au Liban est celui du marché de la fourniture de l’électricité. L’incapacité du secteur public à satisfaire le besoin des citoyens a entraîné le foisonnement d’un marché privé de l’électricité. L’efficacité et la performance de ces micro-entreprises privées ont poussé les quelques distributeurs privés agréés par l’Electricité du Liban (EDL), tel que l’Electricité de Zahlé (EDZ - entreprise privée autorisée à distribuer l’électricité dans la région de Zahlé), à réclamer le permis de produire eux-mêmes l’électricité qu’il distribue.

Par ailleurs, le dégroupement par petites entités (unbundling) semble faciliter la privatisation. Il permet d’adresser aux marchés des signaux sur la qualité de gestion des entreprises (Colombo, 1999).

A ce titre, le Haut Conseil de la Privatisation tente de dégrouper l’Electricité du Liban avant de procéder à sa privatisation, conformément à La loi 462 / 2002 qui organise la privatisation du secteur de l’électricité[1].

La transformation de l’EDL en plusieurs entités privées permet au Liban de suivre l’exemple de la Turquie, de la Pologne et de l’Egypte. La déréglementation et la libéralisation de l’activité de la télécommunication en Turquie a  permis un désengagement du secteur grâce au dégroupement (Kaufmann et Wegner, 2007, p.16). Cette même politique a été appliquée en Pologne où la privatisation du secteur public a été précédée par la transformation de ces activités en sociétés par actions, cédées ensuite à des investisseurs privés (Micolajczyk and Roberts, 2006, p. 371). Ainsi, le dégroupement des entreprises publiques prôné par le gouvernement égyptien a facilité la privatisation des petites entités dépendantes des sociétés holding (Omran, 2004, p. 76). Il a permis de vérifier la robustesse de la structure managériale et financière des sociétés toujours détenues par l’Etat mais soumises au droit privé (Issa, 1995, p. 30).

Dans cette perspective, Garcia et Anson (2007, p. 517) poussent à une restructuration organisationnelle avant la privatisation. Le désengagement ultérieur de l’Etat se fait graduellement pour atteindre le retrait total et ce, en fonction de la capacité du marché boursier à absorber les actions. Ainsi, la réussite de la privatisation de Maroc Telecom est passée par la cession graduelle de 66% de son capital par le gouvernement marocain entre 2001 et 2006 (Kauffmann et Wegner, 2007, p. 13).

 

L’estimation à la juste valeur

La sous-estimation du prix des actions des sociétés privatisables peut être due à l’incertitude future de la réussite conformément aux principes de la théorie de l’asymétrie des informations. Cette sous-estimation des prix entraîne la diminution de la richesse des propriétaires, a fortiori la nation-propriétaire.

Toutefois, la faiblesse du marché boursier libanais pousse à une sous-estimation du prix des actions. Elle peut aussi causer la vente bradée des titres, mais améliore la souscription des investisseurs et réduit le risque de non liquidité du marché. Cette sous-estimation des prix vise à préserver les investisseurs de la fluctuation des cours et de l’incertitude économique.

Par ailleurs, le transfert à grande échelle de l’actif de l’Etat entraîne l’augmentation de l’offre face à une demande stable, ce qui baisse les prix. Selon cette orientation, l’incertitude qui pèse au Liban sur la valeur intrinsèque de l’action des entreprises privatisables pousse l’Etat à sous-estimer le prix initial de la vente. Le prix de cession des actions doit correspondre à leur valeur réelle, ou à la somme des flux futurs de bénéfice pendant une période déterminée. Or actuellement, le déficit annuel et cumulé exorbitant de l’Electricité du Liban (EDL) ne légitime pas la fixation d’un prix quelconque. Compte tenu de la situation actuelle, il est à prévoir que les flux futurs seront négatifs. De plus, la situation nette négative d’EDL n’encourage pas l’arrivée de nouveaux investisseurs, sa valeur comptable étant inférieure à zéro. L’Etat libanais affronte donc le dilemme suivant : céder l’EDL à un prix symbolique proche de zéro et affronter la fronde des anti-privatisations, ou bien laisser traîner la situation présente au risque de creuser le déficit.

La Middle Est Airlines (société privée détenue à 100% par l’Etat libanais), quant à elle, a prouvé sa performance managériale et bénéficiaire. Toutefois, les modifications de la législation (cf § 2.6) acceptant le lancement partiel d’une faible quantité d’actions sur la bourse grâce au principe de vente au meilleur offrant permettent d’éviter la fixation d’une valeur théorique qui peut s’avérer incompatible avec la réalité de l’entreprise privatisable.

Cette politique duplique celle menée par les pays de la région MEDA qui ont procédé à une introduction modérée d’actions des entreprises publiques sur les bourses (Egypte 39%, Turquie 20%, Algérie 12%, Maroc 10% et la  Tunisie 9% - Kauffmann et Wegner, 2007, p. 41). En effet, l’introduction des actions des entreprises publiques en bourse améliore la performance malgré le maintien du contrôle de l’Etat (Shyu et Huang, 2006, p. 222). Ces mêmes auteurs (p.231) ajoutent que la baisse du cours d’actions des  entreprises publiques de 5% permet à la bourse d’absorber  une cotation optimale des actions de 22.25%. Cette situation correspond bien à celle du Liban  étant donné qu’en Egypte, le cours d’introduction des actions des sociétés privatisées était inférieur de 10 à 20% de sa juste valeur(Omran, 2004, p.76).

Par ailleurs, le gouvernement libanais peut: plafonner la participation d’une personne physique ou morale au seuil de 1 ou 2% seulement, ou bien pratiquer une logique de privatisation basée sur le principe d’interactions et d’alliances stratégiques positionnées au sein du « cœur financier » (Morin, 1996, p. 1263). L’alliance entre le public et le privé soit à travers des « joint venture », soit par le biais de contrats de gestion (actuellement en vigueur dans le secteur de la téléphonie mobile), constitue également  une autre manière de procéder à la privatisation. Cette formule ne reste pas sans conséquence sur les relations d’agence et les conflits d’intérêts entre les apporteurs de capitaux, les employés et les utilisateurs. L’idée d’une initiative financière privée dans le cadre d’un partenariat public – privé peut entraîner la création d’une relation contradictoire entre les deux secteurs (Aldered, 2008, p. 31).

Malgré une telle conséquence, l’application du partenariat public – privé a montré l’intérêt d’une telle relation qui favorise l’image de l’économie néolibérale (Aldered, 2008, p.52). La privatisation partielle de Tunisie Telecom offre l’exemple réussi d’un tel partenariat (Kauffmann et Wegner, 2007, p. 35).

Dans le même sens, l’expérience occidentale montre que, concernant la valorisation des entreprises privatisées, les résultats ont été controversés. Dewenter et Malatesta (1997) ont constaté l’absence d’une tendance générale de sous-estimation des prix des entreprises privatisées, contrairement à Jenkinsson et Mayer (1988), Perotti et Guney (1993), ceci par rapport à des entreprises privées de même taille lors de la privatisation.

 

La recherche de la maximisation de la richesse et l’adoption du principe de « cherry picking » par les investisseurs privés

La théorie d’agence accorde à l’utilisation des ressources organisationnelles l’optimisation de la richesse des actionnaires du fait de la performance des entreprises. Cette performance porte sur la capacité manifestée par l’entreprise publique ou privée à minimiser ses coûts et à rechercher des économies durables capables de maximiser la valeur actionnariale.

Toutefois, la privatisation des firmes publiques performantes (téléphonie mobile, Middle East Airlines etc.…) précédant les activités moins performantes conduit à l’application du principe de « cherry picking » (cerise sur le gâteau - Labaronne, 2002) qui conduit lui-même à biaiser le résultat de la privatisation. Dans cette perspective, il est intéressant de savoir si la privatisation a augmenté la performance et l’efficacité des entreprises privatisées.

Notons que si le transfert de la propriété du public au privé a donné une meilleure performance en Europe de l’Est (Labaronne, 2002), son résultat s’est montré mitigé au Liban. La gestion de la téléphonie mobile par les entreprises privées au Liban a permis un développement de la rentabilité. L’application du même scénario à Liban Post n’a pas eu le même effet bénéfique. Le principe du « cherry picking » attendu par les investisseurs canadiens du fait de leur participation dans Liban Post n’a pas fonctionné.

Face à l’insuffisance de la performance, les canadiens de Liban Post ont réussi à se retirer du capital de cette société privatisée par le gouvernement libanais. Le développement de la technologie (E-mail, fax etc.…) a joué en défaveur de la rentabilité de Liban Post malgré une volonté de diversification menée par sa direction.

 

Le renforcement de la bourse par  le drainage de l’épargne populaire

L’importance du marché boursier réside dans l’amélioration de l’efficacité des entreprises cotées du fait du  contrôle exercé. Les entreprises privatisées dans un pays à marché boursier performant sont plus rentables que dans un pays à faible marché boursier (Boubakri et Cosset, 1998).

C’est pour cela que le développement du marché boursier est une nécessité pour privatiser. Il permet 1) l’accroissement de l’épargne en action, 2) l’amélioration de la qualité du service offert, 3) l’augmentation des revenus des entreprises, 4) et surtout l’arrêt de la contribution de l’Etat pour la couverture du déficit. L’Etat propriétaire s’efface devant une multitude d’actionnaires privés, ce qui développe l’épargne en action, la capitalisation boursière et le nombre des sociétés cotées (Kauffmann et Wegner, 2007, p. 41). De plus, cette privatisation développe le pourcentage des transactions boursières nécessaires à l’accroissement du marché boursier (Boutchkova et Megginson, 2000) grâce au nombre et à la taille de ces entreprises.

Cependant, le marché boursier facilite l’échange de la propriété. Il suscite l’émergence d’un environnement favorable à la privatisation. La propriété des activités privatisées sera transférée au nouveau propriétaire. Ce transfert développe une nouvelle structure de propriété qui, en principe, favorise la transparence et la gouvernance. Ces avantages ont incité les autorités publiques en République tchèque et en Pologne à coter immédiatement en bourse les actions des sociétés privatisées (Grosfeld et Hashi, 2007, p. 522). Mais contrairement à l’effet recherché par la cotation boursière, ces mêmes auteurs confirment le départ d’un certain nombre d’entreprises privatisées de la bourse ; pourtant, la cotation et le retrait de la bourse peuvent révéler certaines informations capables de signaliser le marché.

Par ailleurs, le financement de l’activité privatisée se fait à travers le marché boursier, soit grâce à l’émission des nouvelles actions, soit au moyen de l’utilisation de l’effet de levier de l’endettement, et non sur la base des garanties données par le gouvernement. L’ouverture du capital et la cotation des actions sur le marché boursier favorisent la distribution du bénéfice et la plus-value éventuelle sur le cours. Elles permettent aussi de lever des capitaux suffisants pour alimenter les investissements nécessaires à la croissance et à l’adaptation aux besoins de la clientèle.

La mesure de l’efficacité de gestion se traduit par la comparaison de la « valeur appropriable de l’action » avant et après privatisation. Cette valeur s’explique par le dividende distribué et la plus-value latente par action. En effet, l’amélioration de la profitabilité provoque l’augmentation du prix des actions dans un marché efficient. Le cours des actions sera l’indice de la bonne gestion des entreprises privatisées. Les exigences du marché pèsent  pèse sur les dirigeants inefficaces.

C’est la raison pour laquelle le marché permet une comparaison de la performance des entreprises. La privatisation au Liban vise à combler le vide laissé par la faiblesse du nombre des sociétés cotées sur la bourse de Beyrouth (Feghali, 2006). Elle développe la compétitivité de cette bourse par rapport aux bourses régionales, améliore la transparence des opérations de privatisation nécessaires à la réussite et accélère le processus de réforme économique grâce au drainage de l’épargne. La liquidité du marché joue aussi un rôle important sur l’efficience et la valorisation de la performance. La viabilité de la Bourse de Beyrouth repose sur la multiplication du nombre des entreprises cotées. La privatisation peut répondre à cette exigence, elle comble le manque de liquidité boursière.

C’est pour cette raison que la privatisation a profité aux bourses de la région MEDA (Kauffmann et Wegner, 2007, p. 29).

 

«L’ownership society » et l’attrait des investisseurs

Le développement du capitalisme populaire suppose que le gouvernement libanais aura la volonté de soutenir la bourse lors de la future privatisation. La dénationalisation des entreprises publiques sera réalisée en faveur de la population. Ce capitalisme populaire amplifie le mécanisme boursier. La cession, dès les premières négociations boursières, des actions issues de la privatisation renforce la bourse (Yarrow, 1986).

L’épargne en titres se développe. Il cherche à appliquer la théorie du citoyen propriétaire. Les ménages détenteurs d’actions des entreprises privatisées croissent.

L’application d’une telle politique augmente le nombre des intervenants et accroît la capacité transactionnelle de la bourse, ce qui influence les mouvements des offres et des demandes en titres.

Une telle orientation vise le drainage des dépôts. Elle attire les stratégies néo-conservatrices (Ross, 2005), dans le but de capter l’épargne populaire.

La privatisation accroît aussi l’actionnariat des salariés, ce qui permet le renforcement attendu de la bourse. L’intégration des salariés dans le cadre d’un processus de privatisation leur permet d’accéder à la propriété des entreprises dans lesquelles ils travaillent. Ceci constitue une meilleure signalisation visant à mettre en valeur la performance de l’entreprise. Le seul écueil à éviter pour ces entreprises est de continuer à être gérées selon les méthodes en vigueur avant la privatisation, ce qui irait à l’encontre de leur efficacité.

Les résultats des différentes études menées (Labaronne, 2002 ; Earle et Telegdy, 2002) montrent que la reprise des entreprises privatisées par les salariés est moins performante que les entreprises dirigées par les « outsiders ». Les salariés (insiders) sont moins enclins à changer les méthodes de gestion déjà appliquées avant la privatisation. Mais l’actionnariat des salariés permet de minimiser le coût engendré par la théorie d’agence (Jensen et Meckling, (1976) ; Fama, (1980) ; Fama et Jensen (1983). Les salariés actionnaires assument en même temps le rôle du principal-agent en contribuant à faire baisser les conflits d’intérêts entre propriétaires et salariés. L’encouragement d’acquisition des actions des entreprises privatisées par les salariés incite ces derniers à participer à la privatisation. L’offre de conditions privilégiées et de participation au capital des entreprises privatisées, adressée aux salariés, peut calmer la méfiance de ces derniers et les encourager à défendre la privatisation, tout en facilitant l’intégration de la gestion de leur entreprise.

De toute manière, les investisseurs, quelles que soient leurs origines, ne souscrivent aux actions des sociétés privatisées que s’ils peuvent espérer acquérir un actif capable de valoriser leurs droits financiers ou décisionnels. Cette situation repose sur la théorie des  contrats incomplets[2] qui incite les opérateurs à investir. Cette théorie d’incomplétude contractuelle permet aux propriétaires de s’approprier les profits résiduels (Chatelin, 2001).

Par ailleurs, la mobilisation des fonds par les opérateurs libanais soutenus par les investisseurs étrangers ne manque pas en principe. Mais il faut étudier l’attractivité des entreprises privatisées et l’intérêt suscité par cette privatisation pour les investisseurs. Dans cette perspective, Micolajczyk et Roberts (2006, p. 373) estiment que les investisseurs sont intéressés par les sociétés à forte performance.

L’état actuel des activités publiques n’incite pas les investisseurs à s’intéresser à la privatisation au Liban. L’absence d’une structure juridique transparente protégeant ces sociétés de toute ingérence politique, la désuétude des investissements et l’incapacité de dégager des bénéfices ne suscitent pas l’intérêt des investisseurs.

 

2- L’aspect empirique de la privatisation  ainsi que sa justification économique.

La diversité des objectifs suppose le recours à une démarche d’investigation auprès des activités du secteur public candidates à la privatisation, par l’entremise d’un questionnaire adressé à l’ensemble de ces activités ou entreprises publiques permettant ainsi de mettre en œuvre des hypothèses de recherche.

Nous tentons également de mettre en lumière l’intérêt de la privatisation en ce qui concerne : 1) le recours à l’investissement grâce à l’injection des capitaux, 2) le développement de l’actionnariat, 3) le renforcement du marché boursier.

 Exposé de la méthodologie adoptée

Le choix de la méthode d’administration du questionnaire joue un rôle important sur la nature et la qualité des informations recueillies.

En vue d’obtenir le meilleur taux de réponse, le questionnaire a été envoyé par courriel ou remis lors d’une visite personnelle aux directeurs généraux de toutes les activités privatisables de l’Etat, ainsi qu’aux entreprises déjà privatisées.

La faiblesse du taux de réponses à travers les mèls[3] (8 réponses exploitables sur 42 et une réponse inexploitable), nous a poussés à procéder par visites personnelles, précédées d’un appel téléphonique pour fixer un rendez-vous. Ces visites nous ont permis de compléter 34 questionnaires ; nous avons par ailleurs essuyé 27 refus et une impossibilité totale de rencontre dans quatre cas.

A la clôture de l’ensemble de ces démarches réalisées auprès de ces activités ou organismes, nous avons recensé 42 questionnaires exploitables. Ce nombre nous semble acceptable pour le traitement des réponses. La méthode active de réalisation de l’enquête et la simplicité du questionnaire nous ont permis d’atteindre un taux de réponse d’environ 56,76% (42/74). Il est déjà satisfaisant si l’on tient compte de la réticence toute naturelle des fonctionnaires qui n’encouragent pas la privatisation par peur pour leur avenir professionnel et qui, selon la loi libanaise applicable aux fonctionnaires (article 15 du décret-loi n˚ 112 daté du 12-6-1959), n’ont le droit de divulguer ou de donner à quiconque des informations connues dans l’exercice de leur fonction sous peine de sanction disciplinaire.

Quant à l’élaboration du questionnaire, elle a été basée sur un certain nombre de principes dictant la formulation des questions. Le respect d’un ordre systématique des questions selon la méthode dite de l’entonnoir (Funnel method) a été de mise. Elle suppose de préciser le sujet de l’enquête sans enfermer les répondants. Elle aide le chercheur à organiser et à normaliser ses pensées (Berton, Nairn et Money, 2003, p. 55) afin de clarifier et de structurer le construit et de bien viser les bonnes questions, suite à une recension des écrits et une revue de la littérature. Ces mêmes auteurs ajoutent (p.56) que cette méthode de l’entonnoir permet de déterminer des réalités significatives en adéquation avec la théorie. Cependant, ce procédé optimise le nombre des questions afin d’éviter de lasser les personnes interrogées, de minimiser les non-réponses (Dianoux, 2007, p.29), et de maintenir une stabilité et une cohérence des données (Ardilly, 2004, p.62).

Par ailleurs, la taille relativement faible de notre population (74 organismes) nécessite d’apporter un soin particulier au questionnaire pour collecter des informations crédibles sur la privatisation. La facilité de compréhension, la simplicité de lecture et le choix du nombre des questions ont contribué à l’amélioration du taux de réponse. L’échelle pratiquée était celle de Likert (Fortin, Côté et Filion, 2006). Elle est utilisée, dans divers domaines, y compris les recherches en gestion d’entreprises et en économie (Göb, McCollin, et Ramalhoto, 2007, p. 601 et 607), pour mesurer les attitudes et les préférences des répondants en utilisant un échelon impair de r niveaux (Likert R, 1932, p.5). Elle admet que les questionnés puissent exprimer leur degré d’accord ou de désaccord (Drinkwater, 1965, p. 189).

Il est à noter que cette technique permet de retirer de chaque réponse la somme des attitudes, en attribuant à chaque case de l’échelle un poids de 1 à 5 qui restera le même tout au long du questionnaire (Ferguson, 1941, p. 51). Cette procédure connue sous le nom de méthode de la somme des notations (Komorita, 1963, p. 327).

Le souci d’homogénéisation, d’uniformité et de comparabilité,  nous a poussé à utiliser l’échelle suivante à 5 niveaux, applicable à toutes les questions de notre étude (cf tableau numéro 2):

Totalement                    Pas               Sans avis               D’accord                Totalement

en désaccord             d’accord                                                                      d’accord

Cette présentation nous a permis de pouvoir tester statistiquement la validité du questionnaire (cf § 2.4).et de calculer la corrélation entre les variables (Ray, 1982, p. 141).

 

Sélection des activités cibles

La sélection de 42 activités privatisables ou privatisées s’est opérée en respectant une certaine homogénéité pour tenter de couvrir l’ensemble des secteurs, comme le montre le tableau suivant :

Tableau n˚ 1 : Répartition des répondants

Activités

Nombre

  • Eau et électricité
  • Transport et activité portuaire et aéroportuaire
  • Activité bancaire, financière et boursière
  • Medias et agences d’informations
  • Autobus et chemin de fer
  • Loto et loterie
  • Téléphone et télécommunication
  • Hippodrome
  • Caisse nationale de la sécurité sociale
  • Régie de tabac
  • Raffinerie de pétrole
  • Casino
  • Université

15

8

4

3

2

2

2

1

1

1

1

1

1

Total

42

La nécessité d’harmoniser les informations recueillies nous a incité à collecter des données secondaires concernant les activités ou entreprises privatisables ou privatisées qui ont répondu au questionnaire afin de réduire au maximum le biais informationnel.

La quasi-absence d’études spécialisées au Liban en matière de privatisation peut s’expliquer par la pénurie de données statistiques disponibles. Les dossiers tenus par les greffes des tribunaux de commerce ne concernent que les entreprises privées détenues partiellement ou totalement par l’Etat. Les activités publiques privatisables n’étant soumises à aucune obligation déclarative demeurent difficilement repérables.

Pour avoir des données fidèles et à fort degré de confiance, nous avons donc été amenés à multiplier et à recouper les sources.

 Les hypothèses testées

Nous tentons de formuler les hypothèses nécessaires à la validation de l’étude après avoir expliqué la démarche poursuivie en matière de sélection de l’échantillon et la collecte des informations.

H 1 : La privatisation développe le marché boursier.

H 2 : La privatisation élargit l’actionnariat dans la participation à la richesse nationale.

H 3 : Les contraintes financières constituent un frein à la croissance de la productivité.

H 4 : Le changement de propriété à la suite de la privatisation améliore l’efficacité du marché boursier.

H 5 : Après la privatisation, les investissements en technologies nouvelles constituent un indicateur de croissance.

Les hypothèses, reposant en grande partie sur la théorie de la propriété (Alchian et Demsetz, 1972), visent à l’évaluation de la privatisation sur le développement du marché boursier, de l’actionnariat  et de l’investissement.

 

L’évaluation de la validité de la recherche

Cette étape cherche à évaluer la validité de la conduite des répondants vis-à-vis des faits étudiés. Le questionnaire doit refléter le comportement exact des dirigeants questionnés en matière de privatisation surtout au niveau de l’influence de ce processus sur le marché boursier, l’actionnariat et les investissements. Sa validité a été vérifiée au moyen du test de corrélation des rangs de Kendal en vue d’apprécier la nature des relations existantes entre les variables (Feghali, en cours de publication). La « P –value » obtenue grâce à ce test permet de prouver la validité des hypothèses en distinguant la dépendance ou l’indépendance des variables  applicables sur les 42 questionnaires complétés.

L’hypothèse H 0 suppose une indépendance des variables, par contre H 1 estime que les variables sont dépendantes.

P -value <α on accepte H 0

P -value >α on accepte H 1

Le résultat obtenu figure dans le tableau suivant :

Tableau n˚ 2 : Matrice d’auto corrélation du rang de Kendall

                             P -value obtenu selon le test de Kendall

Questions

1

2

3

4

5

1

La privatisation sert-elle à la croissance de la propriété financière ?

 

 

0.937

 

0.751

 

 

0.783

 

 

0.748

 

2

La privatisation sert-elle à soutenir le marché boursier ?

 

 

 

0.772

 

0.807

 

0.771

3

La privatisation sert-elle à la survie du secteur ?

 

 

 

0.863

0.865

4

La privatisation contribue-t-elle à la hausse des investissements ?

 

 

 

 

0.900

5

La privatisation encourage t-elle le recours à de nouvelles technologies ?

 

 

 

 

 

Ce tableau nous montre que P -value est supérieure à α =5% quelle que soit la composition des variables. Cette situation nous pousse à rejeter H0 et à accepter H1.

Ainsi, le test de Kendall a mesuré la capacité du questionnaire à évaluer l’attitude exacte des répondants vis-à-vis des faits étudiés.

Cette validité convergente (Fortin, Côté et Filion, 2006) a permis également de vérifier la corrélation entre les différents éléments de mesure de notre construit. Nos questions étaient bien ciblées. Elles expliquent correctement les hypothèses à vérifier.

De plus, l’utilisation des recherches menées à l’étranger nous a aidé à cibler les questions et à éviter l’utilisation de variables sans lien avec notre sujet.

 

Les contraintes financières et le sous investissement représentent un frein à la croissance, à la productivité et à l’efficience

La réduction considérable des moyens financiers de l’Etat libanais a limité sa marge de manœuvre tout en causant du retard dans la privatisation. S’il est vrai que les entreprises et activités publiques mal gérées et exposées à des interventions politiques ne sont pas des « bijoux » (activités non rentables), l’Etat libanais n’est plus en mesure de les soutenir financièrement. Les stratégies managériales appliquées ne permettent plus d’assurer un fonctionnement normal.

De plus, les entreprises ou activités publiques au Liban connaissent un dysfonctionnement dans leurs situations financières à cause de la hausse de l’endettement et la baisse de la liquidité. Les investissements et la rénovation des équipements constituent des contraintes à surmonter.

Le résultat de notre enquête montre l’intérêt de la privatisation en matière d’investissement :

Tableau n˚ 3 : La survie du secteur grâce à la privatisation

 

Fréquence

Pourcentage

  • Totalement en désaccord
  • Pas d’accord
  • Sans avis
  • D’accord
  • Totalement d’accord

4

5

10

12

11

9,5%

11,9%

23,8%

28,6%

26,2%

Total

42

100%

Pour 54,8% (28,6%+26,2%) des répondants, la privatisation participe à la survie du secteur. Une faible minorité des répondants (21,4%) est en désaccord avec l’intérêt de la privatisation pour la survie des entreprises privatisables.

De son coté, le tableau suivant montre que les répondants (64,3%) reconnaissent que la privatisation concourt à la hausse des investissements des entreprises :

 

Tableau n˚ 4 : la privatisation contribue à la hausse des investissements

 

Fréquence

Pourcentage

  • Totalement en désaccord
  • Pas d’accord
  • D’accord
  • Totalement d’accord

4

11

17

10

9,5%

26,2%

40,5%

23,8%

Total

42

100%

Ces résultats appuient l’hypothèse H 5 selon laquelle la privatisation favorise un investissement en technologies nouvelles, perçu comme un indicateur de croissance.

Dans cette perspective, la privatisation de l’Electricité du Liban (EDL), par exemple, impose des investissements colossaux, non disponibles actuellement, pour assurer la pérennité de cet établissement et atteindre un niveau acceptable de compétitivité. Le matériel très ancien et dépassé n’est plus en mesure d’assurer la survie d’EDL. Face à cette situation, la demande de l’électricité au Liban n’est pas satisfaite, ce qui explique les rationnements quotidiens. Cette situation confirme l’hypothèse H 3 qui suppose que les contraintes financières constituent un frein à la croissance de la productivité.

Par contre, le recours à la méthode de « Build Operate and Transfer » (BOT) lors du lancement de la téléphonie mobile au Liban a permis à l’Etat de se décharger de l’investissement nécessaire pour le fonctionnement des opérateurs. Les deux entreprises privées (Alpha et Libancell) se sont chargées de mettre en place toute l’infrastructure nécessaire au fonctionnement du secteur moyennant une concession pour une durée de 10 ans. Cette privatisation de la téléphonie mobile a encouragé les entreprises concernées à recourir à des technologies nouvelles.

 

Tableau n˚ 5 : La privatisation encourage le recours à de nouvelles technologies

 

Fréquence

Pourcentage

  • Totalement en désaccord
  • Pas d’accord
  • Sans avis
  • D’accord
  • Totalement d’accord

4

2

1

18

17

9,5%

4,8%

2,4%

42,9%

40,5%

Total

42

100%

Ces résultats obtenus corroborent celui trouvé par Chester (2007, p. 996) qui a constaté que l’investissement en nouvelles technologies a évité le déclin du secteur de l’électricité en Australie.

En conclusion, l’inefficacité de la gestion des entreprises publiques et la faiblesse de leurs ressources ont affecté leurs nouveaux investissements en freinant la croissance, la productivité et l’efficience. La privatisation apparaît comme un remède à cette situation d’autant plus que dans certains secteurs, les barrières à l’entrée ne sont pas des obstacles. Au Liban, l’électricité d’appoint est produite au moyen de générateurs, par de petits artisans du secteur privé, pour répondre aux besoins des citoyens lors du rationnement imposé par l’EDL.

Quant au téléphone, la privatisation de la gestion des deux opérateurs de téléphonie mobile a montré l’intérêt de la présence de plusieurs opérateurs.

La répartition de l’actionnariat des sociétés privatisés ou semi publiques

Au niveau de cette recherche, nous allons tenir compte de la taille des entreprises privatisées ou semi- publiques afin d’évaluer leur pouvoir économique :

 

Tableau n˚ 6 : Répartition des entreprises publiques ou semi-publiques en fonction du capital[4]

Capital en Livres Libanaises

Nombre des sociétés

Pourcentage

30 millions – 2 milliards

2 milliards – 10 milliards

10 milliards – 50 milliards

Supérieur à 50 milliards

4

2

2

5

30.77%

15,38%

15,38%

38,47%

Total

13

100%

Cette répartition montre que la majorité de ces entreprises ont une taille trop importante, dépassant 2 milliards de livres libanaises de capital (69,23%), bien que le capital minimum imposé aux sociétés anonymes au Liban soit de 30 millions seulement. Cette situation explique la taille des entreprises privatisables qui ont le statut de sociétés anonymes et qui nécessitent souvent des investissements importants pour leur fonctionnement.

Quant à la propriété de ces entreprises, elle demeure en grande partie la propriété des investisseurs locaux comme le montre le tableau suivant :

Tableau n˚ 7 : Pourcentages des investissements nationaux et étrangers dans les sociétés déjà privatisées ou qui ont un statut d’entreprises semi-publiques

Pourcentages des investisseurs étrangers

Pourcentages des investisseurs libanais

Nombre des sociétés

66,67% [5]

15%

0%

21,2%

100% 6

99,87%[6]

45%

7%

33,33%

85%

100%

78,80%

0%

0,13%

55%

93%

1

1

6

1

1

1

1

1

Total

 

13

Nous constatons que les entreprises semi-publiques ou déjà privatisées au Liban sont en grande majorité la propriété des libanais. La peur du transfert de la richesse nationale à l’étranger ne se justifie pas dans le contexte libanais. En effet, la privatisation au Liban doit se limiter soit à des concessions à durée déterminée, (privatisation selon un protocole avec l’Etat libanais de Liban Post durant une période de 15 ans), soit à des contrats de management pour 2 ans renouvelables (les deux sociétés Alfa et MTC touch dirigent le secteur de téléphonie mobile au Liban pour le compte de l’Etat moyennant des honoraires forfaitaires décidés grâce à une adjudication soldé par la signature d’un contrat de management). La constitution libanaise (article 89) n’autorise l’exploitation des ressources naturelles ou d’un service d’utilité publique qu’après le vote d’une loi spécifique dont l’effet doit être limité dans le temps. La privatisation à la libanaise prend la forme de contrat de gérance libre à durée déterminée, plutôt qu’une vente pure et simple, tant que demeurent inchangées les législations actuelles. De plus, la désuétude de la technologie déjà en place ou la timide acquisition du savoir-faire totalement étranger enlève l’attribut de sensible aux activités de l’Etat.

 La globalisation du marché et l’intérêt prouvé par les investisseurs étrangers vis-à-vis du Liban expliquent cette participation internationale. Cette situation explique donc l’hypothèse H 2 qui justifie l’élargissement de l’actionnariat par une participation limitée dans le temps aux ressources des activités privatisées. Les risques et les avantages inhérents à la propriété de l’Etat seront transférés à l’entreprise nouvelle seulement durant la période de concession par gérance libre.

 

L’évolution de l’actionnariat et le renforcement du marché boursier

La privatisation provoque une modification de la structure de la propriété économique à cause du transfert de l’exploitation des actifs du domaine public au domaine privé (Bös, 1991). Les nouvelles entreprises détiennent le droit de contrôle sur le fonctionnement des actifs. Cette nouvelle direction bouleverse les méthodes de gestion visant la recherche d’une amélioration de la performance.

Le marché boursier pourra en profiter, à la suite de la création de nouvelles entités privées consacrées à la gestion des actifs publics. Dans cette perspective, la réforme et l’intégration économique ont été réalisées en Australie par l’entremise du marché financier et de son contrôle afin de développer la compétition industrielle (Chester, 2007, p. 984). Dans cette hypothèse, la théorie de signalisation annonce aux investisseurs le niveau de l’efficience de l’entité. Elle juge de la réussite ou de l’échec de l’entreprise privatisée. Le gaspillage en vogue avec les activités publiques sera remis en cause avec la libéralisation du secteur. Ajoutons que la privatisation conduit à :

  • L’amélioration de la capitalisation boursière grâce à l’arrivée de nouvelles valeurs,
  • L’augmentation de la liquidité du marché à la suite de l’arrivée des nouveaux investisseurs et l’augmentation du volume des transactions.

L’introduction d’entreprises privatisées sur la Bourse de Beyrouth provoque une dilution des capitaux et une dispersion de la propriété, en raison de l’amélioration de la liquidité du marché.

Le tableau suivant montre l’importance de la privatisation dans le soutien de la bourse :

Tableau n˚8 : La privatisation sert à soutenir le marché boursier

 

Fréquence

Pourcentage

  • Pas d’accord
  • Sans avis
  • D’accord
  • Totalement d’accord

1

9

11

21

2,4%

21,4%

26,2%

50,0%

Total

42

100%

Ce tableau montre que la privatisation au Liban est saisie comme une condition au développement du marché boursier très faible (76,2% des répondants). Il confirme l’hypothèse H 4 qui pose en principe que la privatisation améliore l’efficacité du marché boursier, et l’hypothèse H 1, qui mise sur l’évolution du marché boursier grâce à la dénationalisation. Cette position est compatible avec l’avis de Boutchkova et Megginson (2000) qui ont constaté une croissance des activités du marché boursier à la suite de la privatisation. A cet égard, le marché boursier libanais devrait être élargi à d’autres valeurs si l’on suppose que la volonté de l’Etat est de soutenir ce marché. Le résultat de notre enquête sur l’impact de la privatisation sur la croissance de la propriété financière se résume ainsi :

Tableau n˚9 : La privatisation sert à la croissance de la propriété financière

 

Fréquence

Pourcentage

  • Pas d’accord
  • Sans avis
  • D’accord
  • Totalement d’accord

1

8

14

19

2,4,0%

19,0%

33,3%

45,2%

Total

42

100%

Ce résultat est valable lors de l’absence de concentration de la propriété des actions. Cette concentration explique souvent la faiblesse de la taille du marché boursier libanais. Ainsi la taille des entreprises cotées renforce également le marché. Il conforme à celui obtenu par Garcia et Anson (2007, p. 504).

 

Conclusion

La réussite des privatisations en Occident n’est, en tout état de cause, pas synonyme d’une réussite au Liban. La faiblesse du marché boursier et la structure politique et économique archaïque peuvent être un frein à la réussite de la privatisation au Liban.

L’argument majeur de la privatisation consiste à mettre fin à l’inefficience du monopole de l’Etat tout en réduisant le rôle des entreprises publiques (Barton et Fairbrother, 2007, p. 241). Le transfert de la propriété économique ou  juridique constitue un « challenge » visant la restructuration et le renouvellement des activités publiques privatisables. Il suppose l’amélioration de leur capacité.

Dans cette perspective, l’investisseur privé n’a pas les mêmes objectifs que l’Etat dans la gestion des entreprises. Le retour au bénéfice n’est pas une question de bonne ou mauvaise gestion mais un problème de volonté politique qui a entraîné d’énormes pertes d’exploitation. La création d’entités privées dédiées à la gestion des activités publiques renforce en principe le marché boursier et développe l’actionnariat et les investissements, comme le montre le tableau suivant :

Tableau n˚ 10 : Confirmation ou infirmation des hypothèses

Blocs d’hypothèses

Validée

Non validée

Les intérêts de l’Etat

 

 

H 1 La privatisation développe le marché boursier.

H 2 La privatisation élargit l’actionnariat dans la participation à la richesse nationale.

+

0

 

0

L’efficacité et la performance

 

 

H 3 Les contraintes financières constituent-elles un frein à la croissance de la productivité ?

H 4 Le changement de propriété à la suite de la privatisation améliore l’efficacité du marché boursier.

H 5 Après la privatisation, les investissements en technologies nouvelles constituent un indicateur de croissance.

+

 

+

 

+

 

 

 

 

 

 

Ces résultats nous montrent que la privatisation au Liban tente de développer le marché boursier à la suite de la cotation des sociétés en bourse. Elle n’a qu’une influence qu’occasionnelle sur l’élargissement de l’actionnariat en raison de la limitation dans le temps, selon la Constitution, du transfert de la propriété de l’Etat. Les entreprises privatisées doivent réincorporer le secteur public au terme de la concession ou du contrat de gestion.

La restructuration des activités privatisables de l’Etat libanais est nécessaire pour attirer les investisseurs. L’investissement technologique est un indicateur de la croissance. Les contraintes financières freinent la croissance des entreprises privatisées.

Enfin la privatisation s’étale sur un domaine de recherche très vaste dont nous avons tenté de mesurer l’influence sur le marché boursier et l’investissement par le biais de cette étude. Nous espérons avoir apporté une contribution acceptable à un sujet rarement étudié au Liban.

 

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[1] Cette loi a autorisé le dégroupement de l’Electricité du Liban en plusieurs entités de production, de distribution et de transport, soumises au droit privé.

[2] La théorie des contrats incomplets vise à analyser les interactions des variables qui ne se trouvent pas dans le contrat initial entre cocontractants sur la décision organisationnelle et sur la répartition des richesses de l’entreprise.

[3] Malgré 2 rappels téléphoniques décalés d’un mois chacun.

[4] Les activités privatisables faisant partie du secteur public ne rentrent pas dans le calcul de ce tableau. Seules les entreprises publiques ou semi publiques ou privatisables qui ont le statut des sociétés privées sont prises en compte.

[5] Société étrangère dont les propriétaires sont libanais.

[6] Il s’agit de la société MTC Touch qui gère un opérateur de téléphonie mobile détenu par des investisseurs allemands et saoudiens.

دور الخصخصة في تقوية الأسواق المالية والاستثمارات في لبنان

إن تردي الوضع المالي للدولة اللبنانية  أعاق الاستثمارات الكفيلة بتطوير نشاطات الإدارات العامة. فأضحت الخصخصة وسيلة لتجديد وتقدم هذه الخدمات بحيث أنها تساعد على التطبيع الاقتصادي بواسطة تطوير الأسواق المالية وتحفيذ الاستثمارات. فتحد بذلك من التدخلات وتقلل من تأثير نظرية الوكالة (Théorie d'Agence)  من خلال تفضيل مصالح المساهمين المرادفة لخلق القيمة (Création de valeur)    

وتجدر الإشارة إلى حتمية إعادة هيكلة كل النشاطات العامة المزمع خصخصتها من قبل الدولة اللبنانية قبل البدء بهكذا مشروع وذلك لتشجيع الاستثمارات المحتملة.

لقد أكدت دراستنا مدى تأثير الخصخصة على تحول شكل رأس المال بفضل تنمية المساهمات والاستثمارات والأسواق المالية.