Tribulations du secteur privé entre liberalisation financière et rationnement du credit

Tribulations du secteur privé entre liberalisation financière et rationnement du credit
Préparé par: prof. Viviane Y. Naimy
Associate Professor, Notre Dame University – Faculty of Business Administration & Economics

Introduction

Le développement d’un marché financier représente, en règle générale, un critère de maturité économique, étant donné qu’il favorise pleinement le financement des activités de production. Cependant, le rôle des banques demeure à tout moment essentiel à l’ensemble de l’édifice. Il l’est d’autant plus dans les phases d’émergence. Seul un système financier consolidé et renforcé peut, en effet, servir de base à l’établissement et au développement d’une bourse, ainsi qu’à sa protection. Allié à des orientations rationnelles en matière de politiques budgétaire et monétaire, le secteur bancaire constitue, de facto, la pierre angulaire de la croissance. Le Liban dispose d’un système bancaire performant qui véhicule des ressources financières considérables. Témoin en est le ratio dépôts bancaires/nombre d’habitants qui se trouve être parmi les ratios les plus élevés de la région. Pourtant, ce pays n’a pas été en mesure de canaliser cette liquidité ainsi que les affluences de capitaux vers le financement du secteur productif, essentiellement les PME. Ce paradoxe est le fait d’éléments structurels et conjoncturels qui entravent l’utilisation des capitaux à des fins de croissance.

Le propos de cet article est d’étudier les problèmes de financement du secteur privé libanais, ainsi que le comportement des banques en matière de crédit tout en mesurant les effets de la libéralisation financière sur l’offre du crédit au secteur privé. La question est, en effet, de savoir dans quelle mesure le système financier libanais est capable de remplir sa principale fonction, celle de financer l’économie en vue d’améliorer la croissance.

Seront exposés, en premier lieu, les fondements des interventions du gouvernement (libéralisation et ajustement structurel) et l’effet des politiques économiques sur le système financier, en l’occurrence, le rationnement du crédit pratiqué par les banques. Le rôle des banques libanaises dans la collecte des dépôts et dans le financement de l’économie sera ensuite étudié. Les traits généraux de ce secteur seront dégagés, afin de cerner la spécificité de ses ressources et de ses emplois ainsi que leurs particularités. Seront examinés enfin les effets d’éviction et le rationnement du crédit, avant de proposer un édifice thérapeutique aux suites de blocages économiques observés. 

 

1.Ajustement structurel et rationnement du crédit

Plusieurs pays ont opté pour des programmes de libéralisation et de changement structurel avec l’assistance des institutions financières internationales telles que le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale et ce, dans le but de renforcer la solidité de leurs économies. Lorsqu’un pays invite le FMI à participer à l’élaboration d’un programme d’ajustement auquel il souhaite assurer un appui sous la forme d’un accord de confirmation ou de facilité élargie, cela veut souvent dire que la situation financière du pays en question est parvenue à un seuil critique. La première tâche (souvent fort laborieuse), que doit assumer la mission du FMI, est de faire, avec les autorités du pays demandeur, le point sur la situation dans trois domaines principaux :

(1) les finances publiques,

(2) la monnaie et le crédit,

(3) la balance des paiements.

Il s’agit ensuite de traduire cette situation en chiffres sous forme d’un jeu de tableaux dont tous les éléments doivent être cohérents. L’exigence de cohérence entre éléments statistiques provenant de sources différentes est d’autant plus importante qu’elle permet souvent de redresser des erreurs. La seconde tâche est de comprendre pourquoi la situation s’est dégradée et de voir comment parvenir à l’améliorer. Cette étape, indispensable pour trouver une solution adaptée aux conditions particulières du pays, nécessite d’entreprendre une série de discussions avec les représentants du secteur privé. La troisième tâche consiste en l’établissement d’un programme d’ajustement cohérent, dont il est possible de financer le déficit et qui repose sur des mesures courageuses dont les autorités acceptent la mise en œuvre par conviction de leur nécessité.

Les principales caractéristiques du programme en question se trouvent décrites dans la lettre d’intention adressée par les autorités au directeur général du FMI, y inclus un calendrier des mesures adoptées, notamment celles qui entreront en vigueur avant même l’approbation du programme par le Fonds. Ce texte indique également des objectifs annuels (relativement, en particulier, au déficit des finances publiques, au déficit du compte courant extérieur et au déficit global de la balance des paiements), ainsi que des objectifs trimestriels, dont certains sont traités comme autant de critères de réalisation du programme, c’est-à-dire, critères des critères, dont la réalisation conditionne les tirages sur le Fonds.

Quatre types de critères de réalisation trimestriels sont communs à de nombreux programmes :

  1. Plafonds sur le crédit net du système bancaire à l’ensemble de l’économie ou sur les avoirs nets du système bancaire[1].
  2. Sous-plafonds sur le crédit net au gouvernement (ou au secteur public).
  3. Plafonds sur les arriérés de l’Etat (ou du secteur public).
  4. Plafonds sur les nouvelles signatures d’emprunts extérieurs d’une maturité de 1 à 12 ans avec sous-plafonds sur celles d’une maturité de 1 à 5 ans, à l’exclusion des emprunts concessionnels.

Comme le déséquilibre des finances publiques est généralement à l’origine des difficultés, le critère le plus contraignant est, certes, le sous-plafond sur le crédit net au gouvernement, qui est souvent défini dans un sens large afin de couvrir les entreprises publiques les plus importantes. Pour éviter que le manque de moyens de financement ne conduise à une accumulation d’arriérés de paiements, ce critère est généralement associé à un plafond sur le stock des arriérés en dépit des difficultés rencontrées dans le suivi de ce stock. Le sous-plafond de crédit au secteur public et le plafond sur les emprunts extérieurs conditionnent les moyens de financement du déficit du secteur public. La différence entre le plafond global de crédit et le sous-plafond définit la marge de crédit disponible pour le secteur public. L’expansion globale du crédit bancaire, ainsi que celle de la circulation monétaire, conditionne l’évolution des avoirs extérieurs nets du système bancaire, donc du déficit global de la balance des paiements. 

Bien que la plupart des programmes présente certaines caractéristiques communes, le FMI s’efforce d’adapter chaque programme aux conditions particulières du pays et à la nature de ses problèmes. Les programmes ne se limitent pas à définir des objectifs pour les grands agrégats financiers. Comme ils visent à faciliter la résolution des problèmes spécifiques du pays, ils portent sur une série de mesures concrètes qui, dans certains cas, pourraient être considérées comme relevant de la microéconomie.

En ce qui concerne les recettes fiscales, les programmes incluent souvent des mesures spécifiques et des recommandations visant à élargir l’assiette de l’impôt et à améliorer son recouvrement, ce qui peut requérir une mission d’assistance technique du Département des Finances publiques du FMI. En ce qui concerne les dépenses courantes, une attention particulière est apportée à l’évolution de la masse salariale et au contrôle des effectifs, ce qui peut requérir, an amont, un contrôle des entrées dans les écoles orientées vers la fonction publique, voire une restructuration du système d’éducation et de formation.

Dans le cas le plus fréquent où la réduction du déficit des entreprises publiques est un aspect essentiel de l’assainissement des finances publiques, les programmes spécifient les mesures à prendre pour assurer le redressement des entreprises publiques dont le déficit est particulièrement important. Ces mesures peuvent porter sur un ajustement des tarifs ou des prix, une réduction du personnel ou une restructuration de l’entreprise[2], ce qui peut comporter la fermeture de certaines unités non rentables.

Comme l’objectif des programmes d’ajustement n’est pas seulement de réduire les déficits à des niveaux susceptibles de trouver financement, mais de créer des conditions favorables à l’expansion de la production, une attention particulière est apportée au système des prix. L’augmentation des prix aux producteurs, en particulier pour certains prix agricoles clés, figure parmi les mesures qui doivent être prises dans un certain nombre de programmes d’ajustements.

Ainsi, les effets positifs de ces réformes sur les aspects réels de l’économie ne se sont en général que partiellement concrétisés.

Des études récentes menées sur des expériences de réforme ont porté essentiellement sur deux facteurs déterminant le succès de ces réformes. Le premier facteur est lié au rôle de l’Etat durant le processus de réforme et sa capacité à gouverner. L’expérience des années 80 indique que lorsque le gouvernement n’est plus monopolisé par un groupe ou une coalition de groupes sociaux, il devient capable de gérer pleinement la réforme et de réussir en conséquence la transition. Le deuxième facteur concerne le rôle que peut jouer le secteur financier durant le processus de réforme. Les programmes de libéralisation et d’ajustement structurel visent à étendre le rôle d’attribution des marchés au détriment des décisions administratives prises par le gouvernement. De telles politiques permettent au secteur financier de réaliser et de soutenir la croissance du secteur réel à travers une réallocation efficace des ressources. Le succès d’une réforme dépend principalement de la capacité du secteur financier à assumer son rôle, comme il dépend également de sa vitesse d’ajustement.

 

1. Ajustement structurel et libéralisation financière

 

Les premiers partisans des programmes de libéralisation ont prôné l’élimination des seuils des taux d’intérêt et la suppression des contraintes imposées au système financier, afin de lui permettre de fonctionner librement et de renforcer son efficacité en matière d’allocation de ressources. Une telle démarche était considérée, du moins théoriquement, comme une transition à partir d’un mécanisme d’allocation imparfait vers un mécanisme intégral.

De tels développements ont conduit à une nouvelle méthode d’analyse des réformes économiques. Celle-ci revêt une vision moins optimiste et plus réaliste. D’abord, il s’agit d’abandonner l’hypothèse que les programmes de libéralisation mènent vers un système optimal d’allocation des ressources. Aussi cette attitude introduit-elle explicitement le concept de transition vers un mécanisme d’allocation plus performant en remettant en question les avantages de ce dernier.

Les programmes de libéralisation et d’ajustement structurel visent une décentralisation des décisions économiques par le biais d’un renforcement du rôle des mécanismes du marché. Cependant, en éliminant les seuils des taux d’intérêt et en permettant en même temps aux forces du marché de fixer les prix, ces programmes exacerbent la volatilité de plusieurs variables économiques et renforcent, par voie de conséquence, l’incertitude des agents économiques. En d’autres termes, lorsqu’il s’agit d’améliorer le bien-être social, les partisans de tels programmes de réforme semblent assumer implicitement, qu’en période d’incertitude, la performance des systèmes privilégiant le marché des valeurs - où les décisions des dirigeants sont individuelles - est supérieure à la performance des systèmes basés sur des mécanismes administratifs. Malheureusement, cette supposition n’est pas toujours vérifiée. En fait, si l’on se réfère au théorème fondamental de la non-décentralisation (non-decentralizability) prouvé par Greenwald et Stiglitz (1986), la décision doit prendre une orientation opposée. Autrement dit : les allocations du marché peuvent être améliorées à travers des interventions gouvernementales adéquates.

Dans ce qui suit, une décomposition conceptuelle des conséquences de l’état d’incertitude engendré par de telles réformes est effectuée. Le but principal est d’identifier la source et la nature des incertitudes liées à ces réformes et d’examiner leurs effets sur le comportement des unités économiques en matière de décision.

 
Ajustement structurel

La première source d’incertitude, appelée effet d’ajustement structurel, désigne l’accroissement de cette incertitude suite aux changements de structure économique. Lorsque des programmes de réforme sont appliqués à l’instigation du FMI et de la Banque Mondiale, plusieurs paramètres ayant caractérisé et marqué le système économique se modifient. Par exemple, la plupart des programmes d’ajustement structurel améliorent le mode de production puisqu’ils visent la modification de la stratégie de croissance dans le pays en question. Dans plusieurs cas, les stratégies de croissance ont abandonné les processus fermés d’industrialisation et adopté les systèmes de production ouverts à la concurrence (export-led growth). L’amélioration tacite du mode de production change inévitablement le comportement des agents économiques, ainsi que l’ensemble des informations économiques sur lesquelles ils basent leurs décisions. Cependant, une telle modification dans l’environnement économique réduit ou neutralise le capital d’information (Caprio Jr. G., 1992) nécessaire à la prise de décision. En effet, les banques sont les agents les plus touchés car les données historiques ont peu de pertinence voire aucune dans leur prise de décision. Ces banques ne sont plus en mesure d’évaluer les projets d’investissement, ainsi que les risques correspondants à ces projets. Ce comportement affecte l’offre de crédit accordée par les banques et entrave, par voie de conséquence, la croissance du secteur réel.

 

Libéralisation

Une autre source d’incertitude, étroitement liée aux réformes structurelles, appelée “effet de libéralisation”, résulte du rôle modifié de l’Etat durant et surtout après la transformation. Dans tous les pays en voie de réforme, la transformation affecte les systèmes où les risques sont individualisés. Cela veut dire que les réformes visent à priver le gouvernement de son rôle « d’office d’assurance générale ». Ce qui, par définition, augmente les risques encourus par les agents économiques, même si le risque total demeure constant.

Ces deux effets (d’ajustement et de libéralisation) varient l’un par rapport à l’autre suivant leurs durées et leurs façons d’influencer le comportement des agents économiques. L’effet de l’ajustement structurel est sévèrement ressenti durant la période de transition. Il est possible néanmoins de le réduire en renforçant le capital d’information destiné aux agents économiques, notamment, les banques. D’autre part, l’effet de libéralisation est plus durable. Il exige de tous les agents, notamment, les banques, d’assumer les risques ainsi que les conséquences de toutes les démarches et de toutes les opérations effectuées. Toutefois, l’incertitude de la situation économique, est susceptible d’influencer le comportement des agents, notamment, les banques dans le sens d’une réduction des effets positifs des réformes sur la performance de l’économie. Ce comportement entraîne, en période d’incertitude, ce qu’on appelle en théorie économique le rationnement du crédit ou «credit rationing».

 

2- Rationnement du crédit

Parmi les problèmes détectés dans les pays ayant recouru à des réformes économiques, on note surtout l’élargissement des contraintes financières affectant les entreprises. Les mesures de libéralisation sont supposées accroître l’épargne et renforcer la capacité du système économique à l’affecter à des projets générant des bénéfices sociaux élevés. Etant donné que l’épargne dépend de plusieurs facteurs économiques et sociaux, la libéralisation des taux d’intérêt ne peut pas engendrer une augmentation du taux d’épargne[3]. Toutefois, le développement des marchés financiers peut effectivement entraîner un déplacement de la composition de l’épargne vers l’épargne financière (Akyuz Y., 1993 : p.24-27). Un autre problème théorique concerne la théorie du rationnement du crédit. Il s’agit de savoir si le système financier - principalement les banques - est capable de bien sélectionner les projets garantissant des rendements sociaux importants et s’il est prêt à octroyer des crédits à de tels projets.

Le rationnement du crédit, tel que défini par Ghandhi (1987), est observé lorsque l’échange entre le risque et le rendement est tronqué, de telle sorte que les institutions financières refusent désormais d’assumer une grande partie du risque, abstraction faite des bénéfices attendus : la banque n’est plus en mesure d’accorder ses crédits en fonction de l’aptitude du demandeur à payer le taux d’intérêt le plus élevé et à offrir la garantie hypothécaire la plus importante. Malgré leur aptitude à évaluer les risques, les banques sont incapables d’appliquer des primes de risque suffisantes aux crédits qu’elles consentent. Il en résulte une sous-évaluation structurelle des primes, un rationnement des crédits[4] et un renforcement du contrôle des dirigeants. Pratiquement, cela signifie que certains emprunteurs se voient refuser le crédit « bien qu’ils soient prêts à payer le taux d’intérêt du marché (ou parfois plus), alors que des emprunteurs similaires, disposant des mêmes hypothèses en matière de risque et de rentabilité, obtiennent des crédits » (Jaffee et Stiglitz, 1990 : p. 839). Ce problème a d’abord été détecté par Keynes en discutant des « emprunteurs marginaux insatisfaits » dans son Traité sur la Monnaie (1930). Durant la dernière décennie, plusieurs chercheurs ont traité ce problème et ont développé des modèles d’optimisation du comportement des agents financiers.

Selon la conclusion de base de la théorie du rationnement du crédit, les banques peuvent ne pas augmenter le taux d’intérêt débiteur, même en présence d’une demande importante sur les fonds, de crainte qu’une telle démarche ne réduise le taux moyen du rendement prévu. Ces banques peuvent toutefois augmenter la portion des emprunteurs à faible risque ou inciter les emprunteurs à s’engager dans des projets moins risqués. Il s’en suit qu’une partie des emprunteurs demeure insatisfaite. Contrairement à la situation d’incertitude, le rationnement du crédit n’est pas un phénomène universel. Stiglitz et Weiss (1992) avancent trois conditions selon lesquelles s’effectue le rationnement du crédit :

  1. « Après que les prêteurs aient utilisé tous les moyens à leur disposition en vue de différencier les candidats et contrôler leur situation globale, il doit y avoir une certaine incertitude résiduelle (information imparfaite) ;
  2. Les effets de la modification des taux d’intérêt doivent être assez forts de telle sorte qu’il ne soit plus optimal pour le prêteur d’utiliser pleinement les instruments relatifs à l’octroi du crédit ;
  3. L’offre des fonds doit être telle qu’à l’équilibre walrasien (où la demande est égale à l’offre, en tenant compte de l’utilisation des instruments non liés aux prix, à savoir le collatéral, les titres etc.), les rendements prévus par le prêteur soient moins élevés que dans le cas d’une autre opération ».

En effet, pour être en droit de considérer que le rationnement du crédit est un facteur majeur qui entrave la croissance, il faut démontrer que ces trois conditions sont satisfaites. Il est clair que la première condition est en général remplie. Il reste à valider les deux autres conditions. Par ailleurs, ce rationnement peut être évité si les firmes affichent un niveau de fonds propres élevé (Calomiris T.S. et Hubbard R.G., 1990)  ou si la banque a la liberté de choisir simultanément le taux d’intérêt et le niveau de garantie (Bester H., 1985). Le niveau de fonds propres est ainsi le critère le plus important pour la banque. Cela lui permet de se rapprocher de l’efficacité de la situation de pleine information. Il lui est aussi possible de proposer un contrat multidimensionnel comme mécanisme d’autosélection. Selon Bester (1985), les emprunteurs dont la probabilité de faillite est faible, acceptent généralement une augmentation du montant de la garantie en contrepartie d’une diminution du taux d’intérêt. La banque est ainsi en mesure d’identifier le degré de risque des investisseurs par le biais d’un choix simultané du montant de la garantie et du taux d’intérêt.

 

3- Comportement du gouvernement et offre de crédit

Est étudié ici l’effet des politiques gouvernementales sur le comportement des banques en application du Modèle d’Equilibre des Actifs Financiers (MEDAF), élaboré par Markowitz (1959). Cet auteur a développé une méthode de solution générale du problème de la structure des portefeuilles, qui incorpore le traitement quantifié du risque. Cette méthode propose un ensemble de portefeuilles « efficients », c’est-à-dire qui, pour une rentabilité globale possible, présentent le risque le plus faible, et vice versa. Cette méthode utilise uniquement les concepts de moyenne pour la rentabilité espérée et de variance pour l’incertitude associée à cette rentabilité, d’où le nom de critère « moyenne-variance » associé à l’analyse de Markowitz.

Le MEDAF repose à l’origine sur cinq hypothèses relatives aux investisseurs[5], parmi lesquelles certaines sont suffisantes mais pas nécessaires, tandis qu’elles peuvent être facilement assouplies. De nombreuses recherches, en effet, vont dans cette direction. En fait, il est montré que l’on obtient le même résultat avec des hypothèses beaucoup moins contraignantes.

Selon les partisans de la libéralisation financière, les conséquences négatives du rationnement du crédit ne sont pas inévitables. Cependant, le comportement des gouvernements peut avoir des conséquences indirectes sur l’exacerbation de celui des banques[6] en matière de rationnement du crédit. Aussi avons-nous sélectionné et adapté trois des hypothèses du MEDAF afin d’étudier le comportement des banques[7] en période d’ajustement. Ces hypothèses s’écrivent comme suit :

  1. Il existe dans une économie donnée un seul actif sans risque - par exemple, bons du trésor - et plusieurs prêts risqués, dont les rendements sont normaux et variés, en supposant les variances limitées. La demande des prêts risqués est définie, cependant, en fonction de la moyenne et de la variance des rendements du portefeuille de crédit.
  2. Les banques ont une aversion pour les risques. Cela implique, selon l’hypothèse précédente, que les courbes d’indifférence des banques – définies comme étant la relation entre rendement espéré et risque – soient convexes par rapport à l’origine. La limite des portefeuilles - caractérisée par un niveau minimal de risque, étant donné un certain niveau de rendement espéré - est appelée frontière de rendement du prêt[8].
  3. Les banques ne disposent pas d’informations particulières sur les emprunteurs. De ce fait, elles sont incapables d’évaluer la qualité de ces emprunteurs. Cela réduit la qualité du pool constitué par les emprunteurs, même si le taux contractuel des intérêts augmente.

Les déficits élevés du secteur public et la crise du crédit ou « credit crunch»

L’effet des déficits budgétaires élevés peut être analysé en se référant au graphique 1 tracé sur la base des hypothèses mentionnées plus haut. Avant l’entrée en vigueur des mesures de libéralisation, nous supposons que le gouvernement a pu emprunter auprès des banques au taux d’intérêt réprimé rg1. Cela signifie que les banques étaient en équilibre à (r*1, s*1,) et qu’elles avaient alloué une partie de leurs ressources, l1=s*1/s1 aux entreprises (corporate sector) sous forme de prêts[9]. Supposons qu’en libéralisant le secteur financier, le gouvernement n’arrive pas à réduire les déficits budgétaires. Cela pousse les banques (tel qu’on peut le voir dans le graphique 1), ceteris paribus, à réduire les prêts destinés aux entreprises. (La figure est tracée pour démontrer le cas où l 2< l1 ). L’élimination des plafonds des taux d’intérêt augmente le rendement (yield) des bons du trésor. Par conséquent, les banques ont intérêt à allouer plus de ressources au secteur public et à s’éloigner des autres débiteurs jugés plus risqués. Ce comportement crée ainsi une crise du crédit ou « credit crunch ».

Limites du Modèle

Ce modèle théorique ne peut en aucun cas donner une représentation exacte et complète de la réalité. Il s’agit d’un modèle difficile à tester car il repose sur des variables qui ne sont pas directement observables, telles que les anticipations et les mesures de risques présentes et non passées. Cependant, face à la complexité des décisions en matière de gestion de crédit, il est indispensable d’avoir un modèle de base, une vision globale, pour dégager une tendance quant au comportement des banques en matière de décision et pour proposer les mesures nécessaires à la mise en place d’une réforme.

 

2.Mesure des effets de la libéralisation financière sur l’offre du crédit au secteur privé

L’objet de ce modèle consiste à mesurer les effets de la libéralisation financière sur le crédit bancaire destiné au secteur privé[10]. Ce modèle est décrit par le menu dans l’article intitulé “Measuring the Effect of Financial Liberalization On The Supply Of Credit To The Private Sector: The Case Of Lebanon” (Naimy V., 2005), lequel comprend notamment l’explication et la définition des équations relatives au comportement du secteur privé et aux contraintes budgétaires des secteurs privé non-bancaire, bancaire, public et extérieur. Afin de ne pas encombrer le présent article par des équations complexes et fastidieuses, l’auteur se contente d’y exposer la structure méthodique du modèle de base et de définir les équations relatives au comportement du secteur privé, et ce, en prélude à la dérivation du modèle, laquelle fournit la mesure de l’effet de la libéralisation financière sur l’offre du crédit au secteur privé.

 

Modèle de base

Nous proposons ici un modèle qui distingue un secteur privé (SP), un secteur bancaire (BC: banque centrale; BP: banques privées), un secteur public (SG) et un secteur externe (SE). Il n’y a pas de traitement explicite relatif au secteur externe (SE) et l’aspect de l’offre est dans ce cas complètement ignoré. Ce modèle met en évidence les implications du concept consommation/épargne et des décisions d’allocation de portefeuille. Le tableau 1 présente la structure du modèle.

 

Tableau 1 : Structure méthodique du modèle

 

1. SP

2. BC

 

3. BP

4.SG

5. SE

Total

Transactions non financières

Cp + Dk – (y-T)

 

 

Cg + Ig - T

EN**

0

Obligations

Db

 

 

-Db

 

0

Dépôts

Dm

 

-Dm

 

 

 

Avoirs étrangers

Df

 

 

-A

-Df + A

0

Prêts

-DLp

DLg-DR

DLp + DR

-DLg

 

0

Total

0

0

0

0

0

0

 

La présentation du modèle commence par le secteur privé non-bancaire. Celui-ci est considéré comme un secteur consolidé formé des ménages et des entreprises. La contrainte budgétaire de ce secteur consolidé est présentée à la colonne 1 du tableau 1.

y - T+ DLp =yd + DLp = Cp +Dm+Dk+ Db+Df.                                    (1)

Les variables constituant le portefeuille représentent quatre actifs :

  1. l’argent local réel, (dépôts bancaires : m),
  2. les bons du Trésor réels (b),
  3. le capital physique réel (k), 
  4. la couverture contre l’inflation (actifs étrangers représentés par (f) et libellés en monnaie locale).

Cp représente la consommation privée réelle,

Lp, le crédit privé réel,

y, le revenu réel ou le PIB,

T, les taxes,

Yd, le revenu disponible réel qui est considéré comme étant exogène.

La définition des équations relatives au comportement du secteur privé se présente comme suit :

Dm = a1yd + a2W + a3DLp + a4im - a5ik - a6ib - a7if - a8p (2)

Dk = a11yd + a12W + a13DLp - a14 im + a15ik - a16ib - a17if - a18p e (3)

Db = a21yd + a22W + a23DLp - a24im - a25ik + a26ib - a27if - a28p e   (4)

Df = a31yd + a32W + a33DLp - a34i m - a35ik - a36ib + a37if - a38p (5)

Cp = a41yd + a43DLp - a44i m - a45ik - a46ib - a47if - a48p (6)

Sp= yd - Cp  (7)

W = W-1 + Sp (8)

im, ik, ib et if  sont les taux de rendement nominaux exogènes des dépôts, du capital physique, des bons du Trésor et des actifs étrangers respectivement.

Sp représente l’épargne privée réelle,

W représente la richesse privée réelle.

p e représente le taux d’inflation exogène anticipé.

Les équations 2, 3, 4 et 5 sont celles de la demande des actifs. Elles ont été déduites en s’appuyant sur la fonction d’ajustement multivariée  proposée par Brainard et Tobin (1968), où les changements en matière de richesse (W) entrent sous forme de variable explicative. Cela nous permet d’intégrer les effets (a) et (c) tels qu’ils sont identifiés plus haut. En respectant une pratique courante de la littérature, on suppose que les coefficients du revenu disponible et de la richesse sont positifs dans chaque cas, ce qui implique que tous les actifs sont des biens normaux ; les coefficients de DLp sont également positifs. On suppose que les demandes d’actifs sont positivement affectées par leurs propres taux de rendement et négativement par les taux alternatifs des actifs substituables.

L’équation (6) présente la fonction de consommation. Cette équation n’englobe pas la richesse ou les valeurs séparées des différents actifs. L’exclusion de la richesse provient de l’hypothèse principale et explicite du modèle d’Owen (1981) qui considère que la « fin de la période de richesse » est une conséquence de la décision consommation/épargne et non pas son déterminant. En ce qui concerne les signes des différents coefficients dans l’équation (6), on suppose que 0 < a41 < 1 et a43 > 0. Quant aux taux d’intérêt, nous supposons que l’effet négatif de substitution dépasse l’effet positif du revenu. Toutefois, dans les calculs ci-dessous, nous allons étudier également le cas opposé.

L’équation (7) définit l’épargne en supposant que yd est exogène. L’équation (8) définit la richesse privée. DLp est traité comme étant un facteur exogène au secteur privé.

En supposant que im augmente alors que p e reste constante, dans l’équation (2), la demande de m doit augmenter, à travers l’effet de la réallocation du portefeuille (réaction (a) plus haut). Toutefois, la même augmentation de im entraînera également un effet “indirect”, via la réallocation d’un certain niveau de revenu entre consommation et épargne (équation (6)), le changement de la richesse étant défini dans l’équation (8) (réaction (c) plus haut). Cette dernière augmentation entraîne plus de changement au niveau de la demande de m (équation (2)), étant donné a ¹ 0.

La démarche suivante consiste à dériver les restrictions supplémentaires du sous-modèle précédent. On peut démontrer que l’équation (1) est vérifiée si seulement on retient ce qui suit :

(a1 + a11 + a21 + a31) + a41(1- a2 - a12 - a22 - a32)+ (a2 + a12 + a22 + a32) = 1  (9a)

(a3 + a13 + a23 + a33) + a43(1 - a2 - a12 - a22 - a32) = 1  (9b)

(a4 - a14 - a24 - a34) - a44(1 - a2 - a12 - a22 - a32) = 0  (9c)

(-a5 + a15 - a25 - a35) - a45(1 - a2 - a12 - a22 - a32) = 0 (9d)

(-a6 - a16 + a26 - a36) - a46(1 - a2 - a12 - a22- a32) = 0 (9e)

(-a7  - a17 - a27 - a37) - a47(1 - a2 - a12 - a22 - a32) = 0 (9f)

(-a8 - a18 - a28 - a38) - a48(1 - a2 - a12 - a22 - a32) = 0 (9g)

Il est à noter que dans les équations (9a) à (9g), il n’y a pas de restrictions supplémentaires constituées de coefficients relatifs seulement à la variable de richesse. Comme le signale Owen (1981), dans le modèle intégré, la richesse peut changer seulement dans le cas où une ou plusieurs variables affectant la décision consommation/épargne changeraient, en conséquence, la richesse n’est certainement pas une de ces variables.

Les restrictions de symétrie pour ce modèle exigent que :

a5 = a14

a6 = a24

a7 = a34 (9h)

a16 = a25

a17 = a35

a27 = a36

 

La contrainte budgétaire du secteur bancaire consolidé qui peut être dérivée des colonnes 2 et 3 du tableau 1, est spécifiée comme suit :

DLp + DLg = Dm (10)

où, en plus des variables déjà définies, DLg indique le crédit bancaire octroyé au secteur public.

La contrainte budgétaire publique apparaît à la colonne 4 du tableau 1comme suit :

Cg + Ig – T = DEF = DLg +D b + A   (11)

Cg représente la consommation publique,

Ig, l’investissement public,

DEF, le déficit public, 

A, l’aide étrangère.

 

Libéralisation financière et offre du crédit au secteur privé

Le modèle complet est résolu pour en dériver le résultat suivant :

        

Une série de conclusions peuvent être tirées à partir des résultats précédents. L’augmentation de l’offre du crédit constitue, en fait, le biais qui permet de savoir si le capital physique et la monnaie sont des compléments. De tels résultats peuvent entraîner des déductions intéressantes.

  1. Lorsque le gouvernement finance ses déficits budgétaires en empruntant auprès du secteur bancaire, il n’est pas possible, a priori, de prédire l’effet de la libéralisation financière sur l’offre du crédit destinée au secteur privé.
  2. En l’absence d’emprunt public auprès du secteur bancaire, l’effet peut être clairement déterminé, à condition que la décision consommation/épargne soit sensible aux taux d’intérêt dans le sens conventionnel – en particulier ¶ C/¶ im <0 – ou exogène et n’a aucune influence sur la sélection du portefeuille. Dans les deux cas, l’effet est positif.
  3. L’effet multiplicateur de la libéralisation financière sur DLp est plus grand lorsque la consommation n’est pas soumise à la contrainte de liquidité ou lorsque l’épargne est sensible aux taux d’intérêt.

 

3.Financement du secteur privé libanais

Le système financier libanais est un système orienté vers les banques. Dans un tel système, l’épargne des agents à capacité de financement est transférée aux agents à besoin de financement grâce à des intermédiaires financiers (banques et autres institutions financières). Dans ce système, les entreprises sont fortement dépendantes du crédit bancaire – principal moyen de financement -, d’autant plus que leur taux d’autofinancement est faible. Aussi l’économie libanaise peut-elle être classée parmi les économies d’endettement. Le mode de son financement, les modalités de fixation des taux d’intérêt et le sens de causalité entre la masse monétaire et la monnaie « Banque Centrale » fondent ce jugement.

Dans une économie d’endettement, le système financier est l’élément clef autour duquel se forgent toutes les décisions. Les entreprises et le Trésor font appel exclusivement au système bancaire pour faire face à leurs besoins de financement. Les banques se refinancent principalement auprès de la Banque Centrale. Les taux d’intérêt ne jouent pas leur rôle d’ajustement de l’offre et de la demande sur le marché du crédit. Le marché n’existe pas ou est embryonnaire. Le marché du crédit est un marché de vendeurs dans lequel les banques forment un « oligopole ».

Cette prédominance des banques dans la mobilisation de l’épargne intérieure peut être analysée selon l’importance des dépôts dans la structure des ressources bancaires, ou selon la prédominance des dépôts bancaires dans les composantes de la masse monétaire.

L’analyse du passif bancaire révèle :

1- L’importance des dépôts bancaires dans le total des ressources. Ils ont toujours représenté en moyenne ± 83% de l’ensemble des ressources bancaires.

2- La prépondérance des dépôts à vue dans la structure des dépôts (en moyenne 40% du total des dépôts).

3- La faible assise financière de l’ensemble du système bancaire : la part des fonds propres dans le total des ressources est très faible (6.4% des ressources en moyenne de 1990 jusqu’en 2007). Il est à signaler qu’à partir de 1996, les banques libanaises ont commencé à consolider leurs fonds propres pour faire face à la diversification de leurs activités et à l’application des normes bancaires internationales.

Le rapprochement des dépôts bancaires par rapport aux composantes de la masse monétaire permet de souligner le pouvoir de ces institutions en matière de création et de centralisation de la monnaie. La hausse croissante des dépôts - qui se traduit par une tendance à la consolidation de la monnaie scripturale et de la quasi-monnaie M2 au détriment de la monnaie fiduciaire – peut se refléter au niveau de la masse monétaire. Leur pourcentage est passé de 35% en 1998 à 45% en juillet 2008. Cependant, la monnaie fiduciaire demeure encore à un niveau faible puisqu’elle représente environ 1.8% de la masse monétaire en juillet 2008.

Au Liban, les banques commerciales jouent un rôle important dans le financement de l’économie. En effet, en juillet 2008, sur un actif total de 135.896 milliards de livres libanaises, les banques commerciales ont distribué (aux secteurs public et privé) 66.269 milliards de livres libanaises soit plus de 48%, contre 56.327 milliards de livres libanaises sur un total de 117.087 milliards de livres libanaises en juillet 2007.

On note aussi une prédominance structurelle des créances sur le Trésor dans les emplois bancaires. En 1995, ils ont atteint 7.949 milliards de livres libanaises ou 32,5% de l’ensemble des emplois bancaires, et 35.429 milliards de livres libanaises en juillet 2008 ou 37% des emplois bancaires.

L’action des banques en matière de financement de l’économie, quoique très déterminante, semble souffrir de quelques limites. D’abord, cette action est caractérisée par la prépondérance des crédits à court terme dans la structure des crédits octroyés par les banques commerciales. La seconde limite tient à la forte concentration sectorielle des crédits bancaires. De même, la répartition géographique des crédits montre que Beyrouth et ses banlieues accaparent environ 82% du total des crédits octroyés.

Le Liban est l’un des rares pays, avec la Suisse, où la dimension monétaire est supérieure à la dimension économique, ainsi qu’en atteste le ratio actif total / PIB qui dépasse 350% depuis 2006.

Le système bancaire libanais a réussi à renforcer durant les dernières années sa solidité, caractérisée par une gestion bancaire saine et un contrôle bancaire rigoureux en matière de conformité des règles et des procédures de contrôle aux critères et standards internationaux. Ce raffermissement a contribué, en dépit de toutes les crises financières, à empêcher la fuite des capitaux à l’instar de plusieurs économies émergentes. En outre, le secteur bancaire libanais a fortement contribué au financement du déficit budgétaire à un niveau dépassant les 70%. De même, elles ont prouvé une certaine efficience dans le financement des activités du secteur privé, la part des crédits accordés à ce dernier ayant constitué en moyenne 81% du PIB sur la période 1998-2007.

 

Ressources du secteur bancaire libanais: abondance et mauvaise répartition

Les ressources des banques libanaises sont constituées traditionnellement  par les dépôts de la clientèle privée, notamment, sous forme de comptes d’épargne. Les banques libanaises ont pu compter traditionnellement sur l’épargne interne pour laquelle elles sont en situation de quasi-monopole, faute d’un marché financier performant, de l’existence d’un réseau de caisses d’épargne ou de services financiers de la Poste.

Les dépôts sont évalués à 113,080 milliards de livres libanaises à la fin juillet 2008 et représentent 83% du total du bilan consolidé des banques commerciales. Ces dépôts sont répartis entre les dépôts du secteur privé résident (84,4%), ceux du secteur privé non-résident (14,6%) et ceux du secteur public (1,0%). Ces dépôts se sont accrus de 15,7% par rapport à juillet 2007.

Il est à noter que les banques fournissent des efforts continus en vue de prolonger les termes de leurs ressources, dans le but de promouvoir le financement à moyen et long termes. Ce principe de transformation s’est traduit par l’endettement de plusieurs banques sur le marché local et étranger, par le biais de l’émission de certains instruments financiers à long terme. Néanmoins, les ressources bancaires sont à courte échéance, l’Association des Banques du Liban les estimant à 45 jours. Ainsi faut-il encourager une épargne à plus long terme par l’introduction des politiques adéquates, à savoir un traitement différencié en matière d’intérêt et une élaboration de certains instruments et produits financiers diversifiés. La disponibilité des ressources stables et à long terme contribue, en effet, à la réduction du différentiel qui existe entre les termes de l’actif et du passif, ce qui est plus conforme aux règles relatives à une gestion bancaire saine.

Jusqu’en 1983, les dépôts s’effectuaient principalement en livres libanaises et représentaient en moyenne plus de 70% des dépôts. Sous l’effet d’une très forte dépréciation de la monnaie libanaise, de très importants mouvements de reconversion en dollars se sont ensuite produits, à tel point que les dépôts en livres ne  représentaient plus que 10% du total de l’épargne en 1987. L’amélioration de la croissance économique en 1993, ainsi que la stabilisation du cours de la livre, a permis aux dépôts en livres libanaises de repasser la barre des 30%. Courant 2008, la part des devises dans le total des dépôts bancaires s’élevait encore à 74%. L’importance des fonds libellés en devises, pour l’essentiel en USD, est très significative : l’expression de régime bipolaire livre libanaise/dollar est loin d’être excessive puisque l’agrégat M3 est dollarisé à hauteur de 68%. Il reste que la part du marché du dollar dans « le marché de la monnaie scripturale » et de ses substituts proches recule. Plusieurs facteurs expliquent ce rééquilibrage : en particulier, l’amélioration du taux de change de la livre ces dernières années, ainsi que l’application de taux d’intérêt élevés à la monnaie nationale. L’accroissement des liquidités engendré par les excès budgétaires (notamment ceux relatifs au service de la dette) et l’importance des dépenses publiques interviennent également dans la décrue du taux de substitution des monnaies.

 

Les emplois du secteur bancaire libanais : déséquilibre entre secteur public et secteur privé

Les banques se montrent extrêmement agressives pour capter l’épargne des ménages et surtout pour la garder : les dépôts bancaires présentent en effet un caractère très fragile et versatile. Les dépôts du système bancaire libanais sont fortement atomisés avec des soldes moyens de 10 000 à 15 000 dollars que se répartissent les banques. Ce sont pour l’essentiel des dépôts à court terme, toujours prompts à être convertis en USD et à s’expatrier[11]. La durée de vie moyenne des dépôts ne dépasse pas en effet un mois et demi. Ceux-ci sont très volatiles et très sensibles aux variations des taux de change et des taux d’intérêt et traduisent une certaine frilosité face aux incertitudes du marché interne. Globalement, seul le maintien de taux d’intérêt élevés sur les dépôts en livres libanaises permet d’attirer l’épargne des ménages, ce qui ne manque pas d’alourdir de façon significative le coût du crédit en livres libanaises.

Malgré la diversification des produits et des services bancaires au cours des derniers exercices, les perspectives de placement du secteur bancaire libanais restent relativement réduites et sont davantage dictées par les contraintes de la Banque du Liban et par la politique d’endettement qu’elle mène pour le compte du Trésor, que par une stratégie fondée sur les besoins du marché.

L’actif des banques se partage entre l’Etat, le marché bancaire et la clientèle privée.

a- Créances sur l’Etat

L’essentiel des facilités prend la forme de bons du Trésor en livres libanaises et de bons en devises émis sur les marchés financiers internationaux. Jusqu’en 1992, les banques étaient en effet tenues de réemployer en bons du Trésor leurs ressources en livres libanaises. Cette obligation de réemploi a été progressivement réduite pour être supprimée en 1997. Afin d’assurer le financement du Trésor, la Banque du Liban a imposé aux banques commerciales une réserve obligatoire de leurs dépôts en livres et en devises ainsi que des certificats de dépôts émis par la Banque du Liban remplaçant les bons du Trésor, dont l’émission a été suspendue par l’Etat, en plus de la contribution des banques en espèces au lendemain de la conférence de Paris II à un taux de 0% : pratiquement, le ratio des dépôts des banques commerciales auprès de la Banque du Liban par rapport au total des dépôts a atteint 31% en juillet 2008.

En fait, les bons du Trésor restent très recherchés (en moyenne plus de 86% des placements en livres libanaises) du fait de leur sûreté et de leur rémunération très élevée. A ce jour, les banques libanaises continuent à souscrire massivement aux bons du Trésor qui bénéficient toujours de taux attractifs[12].

La part des banques dans le financement de la dette publique interne est passée de 74,4% en 1998 à 74% en 1999 et à 76 % fin juillet 2008. En effet, en 1999, la part de ces bons constituait 85,6% de l’ensemble des dépôts en livres libanaises et 91% en juillet 2008. La valeur des créances sur le secteur public s’élève à 35.429 milliards de livres libanaises en juillet 2008, ce qui représente 26% de l’ensemble des actifs, contre 21.840 milliards de livres libanaises en 1999, soit 36% de l’ensemble des actifs. La part des crédits libellés en livres libanaises constitue 67% des dépôts en livres en juillet 2008. Ces proportions sont considérées comme étant très élevées, au vu de la faible contribution du secteur public au produit intérieur brut. Cela reflète également la concurrence que fait le secteur public au secteur privé quant à l’obtention du financement nécessaire en livres libanaises dans un contexte de pénurie de ressources disponibles.

 
b- Créances sur l’économie

Faute de ressources disponibles en livres libanaises et compte tenu des taux d’intérêt toujours élevés sur la monnaie nationale, l’essentiel des  crédits  accordés à la clientèle privée s’effectue en devises, principalement en dollars. Les avances en devises représentent ainsi plus de 85% du total des crédits accordés par les banques au secteur privé. Trois facteurs expliquent ce très fort degré de dollarisation :

  • Le premier facteur tient à la très forte disponibilité des ressources en devises, puisque les dépôts bancaires restent en majorité constitués de devises (les ressources en livres libanaises étant placées en bons du Trésor).
  • Le deuxième facteur est lié aux taux d’intérêt débiteurs nettement plus élevés sur la livre que sur les devises (l’écart peut atteindre jusqu’ à 8 points de base).
  • Enfin, le troisième facteur relève des risques de change sur la livre libanaise, laquelle a connu de fortes variations ces dernières années. Les débiteurs préfèrent s’endetter en dollars parce que les taux d’intérêt débiteurs sont inférieurs à ceux de la livre et parce qu’ils préfèrent s’endetter en devises pour rembourser dans une monnaie dépréciée.

En raison de l’attrait des avances au secteur public (absence de risque et rémunération élevée), on constate que la part relative des prêts au secteur privé par rapport à l’ensemble des avances bancaires est en diminution. Cette évolution témoigne des difficultés de trésorerie rencontrées par les entreprises libanaises, surtout si l’on tient compte du fait que la part des prêts bancaires à la consommation est comme nous l’avons souligné, en progression constante. Le taux des crédits octroyés au secteur privé en pourcentage du total des crédits distribués sur la période 1993-2008 est de 34%.

Au total, les entreprises sont, à l’évidence, victimes d’un credit crunch en livres libanaises et doivent compter avec des crédits en dollars pour espérer financer un quelconque projet d’investissement. C’est là le signe manifeste d’une économie monétaire désarticulée au sens où la dollarisation des dépôts et des crédits est le signe que la monnaie « publique » sert avant tout le financement du déficit budgétaire et irrigue imparfaitement une sphère privée contrainte de faire appel au dollar. Les banques, de même que les débiteurs, sont à la fois victimes et responsables de cette situation qu’il conviendrait d’infléchir afin de redonner à l’économie monétaire, fût-elle bipolaire, toute sa cohérence et sa vigueur au titre de l’impératif du financement de la croissance.

L’étude de l’évolution des crédits bancaires accordés au secteur privé résident permet de mettre en exergue les faits suivants :

  1. Un ralentissement du rythme de croissance de l’ensemble des crédits octroyés au secteur privé.
  2. Une légère croissance des crédits accordés en livres libanaises. Cela est principalement dû aux prêts bénéficiant des exemptions de la réserve obligatoire. En fait, la Banque Centrale accorde des subventions aux intérêts débiteurs sur les crédits consentis aux secteurs productifs, à savoir : les secteur de l’industrie, de l’agriculture et du tourisme.
  3. Un niveau de dollarisation des crédits toujours élevé dépassant en moyenne 82% sur la période 1993-2008.
  4. Une hausse du ratio crédits en devises sur total des dépôts en devises. Ce pourcentage reste toujours au-dessous du plafond des 70% requis par la Banque du Liban. Aussi celle-ci a-t-elle émis une circulaire obligeant les banques commerciales à assurer un taux de liquidité de 30% des dépôts en devises étrangères.
  5. Une concentration des crédits dans la capitale et la banlieue à hauteur de 81% de la valeur totale des crédits accordés sur la période 1993-2008.
  6. Une concentration effrayante des crédits octroyés à un nombre limité de bénéficiaires : 4% des bénéficiaires profitent de plus de 75% de l’ensemble des crédits octroyés au secteur privé. 

 

Conclusion

L’économie libanaise est classée parmi les économies d’endettement. Comme on l’a vu, le système financier libanais est un système orienté vers les banques. La prédominance de ces dernières dans la mobilisation de l’épargne intérieure est mise en relief par l’importance des dépôts dans la structure des ressources bancaires, ainsi que par la prédominance des dépôts bancaires dans les composantes de la masse monétaire.

Ces banques jouent un rôle important dans le financement de l’économie. En moyenne, elles distribuent 70 % de leur actif total sous forme de crédit (aux secteurs public et privé). Une prédominance structurelle importante des créances sur le Trésor dans les emplois bancaires est enregistrée. Cependant, ce financement semble souffrir de quelques limites :

  1. Prépondérance des crédits à court terme dans la structure des crédits octroyés par les banques commerciales.
  2. Forte concentration sectorielle des crédits bancaires.
  3. Forte concentration quant à la répartition géographique des crédits : Beyrouth et ses banlieues accaparent environ 81% du total des crédits octroyés.

L’analyse des caractéristiques du bilan des banques commerciales libanaises, tant du côté des ressources que des emplois, nous a permis de constater que l’un des traits saillants de l’économie monétaire libanaise est la forte dollarisation à la fois des dépôts et des crédits. Cette dollarisation constitue un frein sérieux au financement de la croissance et plus étroitement, au financement de l’investissement industriel :

  1. Les agents qui présentent un besoin de financement sont en effet victimes d’un crédit crunch en livress libanaises.
  2. L’atteinte portée à la livre comme monnaie véhiculaire hypothèque sérieusement tout retour à une croissance soutenue.

Ainsi la dollarisation maintient-elle l’activité des banques de dépôt dans un profil traditionnel insuffisamment tourné vers le financement de l’activité économique : la banque libanaise apparaît comme une simple voie de transit des dépôts en livres libanaises vers le secteur public.

De même, la bipolarité du système monétaire libanais révèle une incohérence fonctionnelle au niveau du mode de financement intermédié :

  1. Faiblesse du canal du crédit en livres libanaises. Cette devise n’est plus considérée comme une monnaie de crédit servant de support aux projets d’investissement des entreprises, donc ultérieurement à des paiements directs en livres libanaises.
  2. Importance relative du canal du crédit en dollar : outre le risque de change qu’il fait peser sur les débiteurs, ce canal–refuge constitue une antichambre accédant directement aux dépôts à l’étranger. Par voie de conséquence, les dépôts ne sont pas en mesure de servir aux transactions, ils ne servent pas non plus d’unité de compte.

Il s’agit, en fait, d’une économie monétaire désarticulée, dans le sens où la dollarisation des dépôts et des crédits montre que la monnaie « publique » :

  1. sert, en premier lieu, au financement du déficit budgétaire,
  2. irrigue imparfaitement une sphère privée contrainte de faire appel au dollar.

Au total, le système financier est fortement intermédié au Liban :

  1. Les entreprises puisent la quasi-totalité de leurs ressources externes de financement dans le crédit bancaire.
  2. Les placements des ménages se font sous forme de dépôts bancaires.
  3. Le pouvoir des banques dans l’économie libanaise est décisif.
  4. Elles ne jouent en aucun cas le rôle d’actionnaire (contrairement aux banques universelles en Allemagne).
  5. Avec les réformes de l’environnement bancaire, les banques ont largement diversifié leurs activités, sans pourtant parvenir au stade où elles seraient en mesure de pratiquer toute la gamme des opérations financières, ce qui demeure l’apanage des banques universelles.

En tout état de cause, aucune amélioration n’est envisageable sans l’instauration de nouvelles politiques budgétaire et monétaire qui permettent à nouveau au secteur privé de bénéficier d’une part importante de l’épargne nationale. En tête des problèmes à résoudre :

1- Prévalence systématique du secteur tertiaire au détriment des secteurs primaire et secondaire.

2- Lourd déficit public.

3- Déficit de la balance commerciale qui menace le solde de la balance des paiements.

Le redressement de cette situation nécessite la mise en place d’un programme d’ajustement structurel et d’un plan de développement, dans un contexte d’assainissement de la situation financière et monétaire. Cette perspective est seule à pouvoir permettre au système financier, secteurs bancaire et boursier confondus, d’employer l’épargne privée à des fins productives, garantissant une croissance soutenue et des résultats macroéconomiques plus performants. Il s’agit de l’adoption d’une politique qui s’appuie sur les bases suivantes : réforme du régime des recettes et des dépenses en vue d’une réduction du déficit budgétaire, accroissement du concours du secteur privé productif dans l’activité économique, réforme de l’administration, réforme du système fiscal, réforme des taux d’intérêt locaux - avec adoption d’une nouvelle structure en la matière - et adoption d’un taux de change souple et réaliste.


 

Références

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  27. Stiglitz J.E., et Weiss A., (1992). “Asymmetric Information in Credit Markets and Its Implications for Macro-Economics.” Oxford Economic Papers, p: 694-724.
 

[1] Ce dernier est la somme du crédit intérieur et des autres éléments nets de la balance du système bancaire.

[2] Eu égard à la complexité des problèmes, il est généralement nécessaire de procéder à une étude détaillée des problèmes de chaque entreprise avant de pouvoir établir un diagnostic et prescrire un traitement. Ces études sont souvent exécutées avec l’assistance technique et financière de la Banque mondiale.

[3] Akyuz dresse une liste des facteurs économiques pouvant affecter la croissance du taux d’épargne dans les économies en réforme. 

[4] Ce rationnement peut apparaître dans ce contexte comme traduisant une inaptitude de la banque à résoudre le problème d’information asymétrique.

[5] (1) les investisseurs ont une aversion pour le risque, (2) les investisseurs ont un horizon de gestion semblable, (3) les investisseurs font à-peu-près les mêmes anticipations quant à l’évolution des rendements futurs des actifs financiers, (4) les investisseurs peuvent emprunter et placer au même taux en vigueur, (5) les investisseurs peuvent placer des montants illimités dans n’importe quel actif financier sans pour autant modifier l’équilibre des cours et le rendement de chacun des placements.

[6] Bell C., 1990, “Interactions between Institutional and Informal Credit Agencies in Rural India”, The World Bank Economic Review, 4(3) : 297-327, Holf K. et Stiglitz J.E., 1990, “Introduction: Imperfect Information and Rural Credit Markets – Puzzles and Policy Perpectives”, The World and Economic Review, 4(3) : 235-250.

[7] Au lieu de l’investisseur selon le MEDAF.

[8] Dans ce cas, la terminologie est adoptée eu égard aux prêts et ce, en prolongement de l’argument. Les principes fondamentaux sont plus développés et s’appliquent à tous les actifs financiers risqués. L’approche de la gestion de portefeuille de crédit relative à l’analyse du comportement des banques durant le processus de réforme est examinée par Caprio Jr. (1992).

[9] Puisque le portefeuille des banques est constitué d’actifs non risqués (BDT) et d’actifs risqués, la variance du portefeuille est la moyenne pondérée de tous ces actifs. En utilisant cette relation, on déduit la valeur de l’expression donnée ci-dessus, relative à la part allouée aux entreprises.

[10] Les effets de l’emprunt public auprès du secteur bancaire ainsi que les effets d’éviction sont exposés en détail par Naimy V. (2003).

* EN = exportations nettes.

[11] Même les dépôts bloqués peuvent être exigibles à tout moment.

[12] Parallèlement à cela, a été crée un marché secondaire des bons du Trésor, où le principal offreur reste la Banque Centrale qui intervient à partir d’un portefeuille qu’elle s’est constituée et qu’elle aménage au fil des émissions. En théorie, les banques peuvent s’adresser à la Banque du Liban pour réescompter les bons en cas de difficultés de trésorerie. Cependant les conditions fixées pour ce faire sont dures à tel point que les banques n’y ont recours que marginalement.

محنة القطاع الخاص بين التحرر المالي وتقنين التسليف

إن تطور سوق مالية ما يشكل بشكل عام عامل نضوج اقتصادي كونه يشجع بشكل كبير على تمويل أنشطة إنتاجية. مع ذلك يبقى دور المصارف أساسياً في مجمل الهيكلية، وبشكل كبير عند الانطلاق. وحده نظام مالي صلب ومدعوم باستطاعته أن يشكل أساساً لإنشاء وتطوير بورصة ما وكذلك حمايتها. بارتباطه بتوجيهات منهجية خاصة بالسياسات المالية والنقدية، يشكل القطاع المصرفي الحجر الأساس للنمو . إن موضوع هذا المقال هو دراسة مشاكل تمويل القطاع الخاص اللبناني، كذلك سلوك المصارف بما يخص التسليف بالإضافة إلى قياس تأثيرات التحرر المالي على القروض المقدمة للقطاع الخاص. وتكمن المسألة في معرفة إلى أي مدى باستطاعة النظام المصرفي اللبناني القيام بكل واجباته، أي تمويل الاقتصاد من اجل تحسين النمو. في المقام الأول سوف يتم بحث أسس تدخل الدولة (تحرير وضبط بنيوي) وتأثير السياسات الاقتصادية على النظام المالي، والحالة هذه، تقنين التسليف المعتمد من قبل المصارف. ثم سوف تتم دراسة دور المصارف اللبنانية في جمع الإيداعات وتمويل الاقتصاد. سوف يتم استخراج العناوين الأساسية للقطاع من اجل تحديد نوعية موارده، استخداماتها وخصائصها. وفي النهاية ستتم دراسة تأثيرات إقصاء وتقنين التسليف، قبل طرح النظام العلاجي لسلسلة التعثرات الاقتصادية الحاصلة.